Ridiculosa n° 15 2008, Caricature et religion(s), sous la direction de Jean-Claude Gardes et Guillaume Doizy, Actes du colloque de Brest (572 pages), plusieurs centaines d'illustrations en noir et en couleurs, résumés des articles en trois langues, 27 euros.
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L’affaire dite des « caricatures de Mahomet » a rappelé combien il était difficile et périlleux d’exposer la religion aux sarcasmes de la caricature. Certes, il aura fallu une instrumentalisation politique des images et une republication de ces images dans une situation mondiale particulièrement tendue pour que le monde « s’embrase » à grande échelle. Mais l’objet même des dessins n’était pas neutre. Les caricatures visaient le principal représentant d’une des trois religions monothéistes de la planète, rien de moins ! Par le passé, de vives réactions avaient déjà été suscitées par la publication d’images touchant d’autres religions, d’autres Eglises.
En publiant ce recueil, nous avons décidé de proposer une réflexion sur ces événements récents, mais également de réfléchir au passé. La caricature s’intéresse-t-elle depuis longtemps à l’institution morale et sociale, quasi ontologique que représente la religion ? Quels angles d’attaques sont généralement choisis ? Que nous apprennent ces caricatures sur les représentations mentales de ceux qui les diffusent, sur les mentalités collectives ? Les religions elles-mêmes n’ont-elles pas eu tendance à instrumentaliser ce type d’images, dans un but moralisateur, voire propagandiste ?
En cela, nous avons souhaité poursuivre la réflexion initiée par des collègues qui, très tôt après le début de la crise liée à la publication des douze dessins par le Jyllands-Posten danois, ont choisi de s’interroger collectivement et publiquement sur ces problèmes. Nous pensons à la table ronde organisée par Christian Delporte le 11 mars 2006 en compagnie de Patrick Eveno, Laurent Martin, Marie-Anne Matard-Bonucci, Daniel Bougnoux et le dessinateur Cardon, sous le titre « Caricature : violence, censure, liberté de la presse - Une mise en perspective historique ». Nous pensons également à Annie Duprat et Jacqueline Lalouette qui, lors d’une journée d’étude au Musée d’Art et d’Histoire de Saint-Denis ont réuni historiens et théologiens autour du binôme « Caricature et sacré (1) ».
Nous avons choisi d’ouvrir ce recueil intitulé « Caricature et religion(s) » sur les « Usages iconoclastes de la religion au cinéma, dans la bande dessinée et les journaux satiriques d’aujourd’hui » pour souligner d’emblée la variété des supports retenus ainsi que la diversité des réponses face à un phénomène vaste et complexe. La religion intéresse en effet tous les genres. Le dessin de presse multiplie les saillies comiques visant le Christ comme par exemple dans Le Nouvel Os à moelle (Christian Moncelet). Plus militantes, les charges de Charlie Hebdo dénoncent le clergé réactionnaire dans les mêmes années, mais ne visent alors que les représentants de l’Eglise catholique (Stéphane Mazurier). Philippe Kaenel montre de son côté le succès des parodies de la Bible depuis la fin du XIXe siècle - et jusqu’à une époque très récente - dans la bande dessinée, sous la plume de dessinateurs sceptiques ou au contraire favorables à la religion. Avec Valentine Robert et Gaïd Girard, deux expériences cinématographiques nourries de satire sont analysées : « La vie de Bryan » des Monthy Python et « Mash » de Robert Altman. Les textes saints, les dogmes et les représentants des Eglises forment pour l’image (fixe ou animée) satirique occidentale du XXe siècle un sujet inépuisable et traduisent leur enracinement dans les esprits, dans la culture. Aucun registre n’est négligé. Le comique devient l’instrument de la raillerie ou de la dénonciation. La parodie permet quant à elle de prendre de la distance et d’éviter l’atteinte frontale du blasphème. Bien que les limites du sacré intouchable aient considérablement reculé au XXe siècle en Occident, les auteurs rappellent combien les réactions ont pu être vives à la publication de telle ou telle image. Thomas Hochmann cherche d’ailleurs à comprendre sur quels fondements juridiques s’appuient les dénonciations de ces satires considérées comme sacrilèges par certains et quelles limites la loi impose à la liberté d’expression sur ce terrain-là, notamment en Europe. Les notions de blasphème et de discours de haine apparaissent comme les principales normes invoquées, quoique inégalement présentes dans les différents droits européens.
Après avoir analysé le travail de quelques satiristes contemporains sur la religion et les Eglises, il nous a semblé important d’évoquer un passé plus lointain dans la première partie de la rubrique « Caricature et religion(s) en Europe ». C’est que, en Occident au moins, depuis que l’Eglise chrétienne a fait le choix de l’image (second concile de Nicée, VIIIe siècle), la représentation, puis la satire, envahissent l’imaginaire visuel des artistes. Les contributions que nous publions dans les pages qui suivent, richement illustrées, permettent de mettre en lumière l’ancienneté des railleries « internes » qui ont visé le clergé, au sein même des églises, au cœur même du sacré. Divers intervenants (Laurence Dalmon, Franck Thénard-Duvivier, Welleda Muller) soulignent la récurrence de ces charges parfois difficiles à interpréter, sans doute moralisatrices, tantôt visibles par tous les fidèles sur les portails des églises, tantôt accessibles aux seuls religieux, dans les stalles du chœur.
L’époque moderne n’est pas en reste. L’Eglise devient en maintes circonstances l’objet de critiques puissantes. Ainsi en est-il au XVIIe siècle, avec une caricature italienne du Bernin contre le pape Innocent XI, dont Xavier Vert nous démontre la complexité des références, rappelant les pratiques d’humiliation et de mortification accomplies lors du possesso (injures, violences obscènes et molestations perpétrées sur le cadavre du pape). Au siècle de Lumières, l’Affaire Girard-Cadière (Stéphane Lamotte) met en joie les dessinateurs qui se complaisent à figurer les amours interdites entre un jésuite et sa pénitente. Les analyses de Tamara Hunt et de Marina Bujoli-Minetti nous éclairent quant à elles sur la prégnance du discours religieux dans les caricatures anglaises de la fin du XVIIIe siècle, montrant à quel point les Eglises, leurs symboles et leurs pratiques, demeurent fondamentales dans la mise en scène et la caractérisation des puissances politiques. La religion nourrit le langage de la caricature et lui permet de distinguer, dans une vision manichéenne du monde, le bien du mal, ses amis de ses ennemis.
Avec le XIXe siècle, la presse s’empare de l’image satirique. Le dessin de presse politique naît alors en France avec Philipon et Daumier avant de se répandre dans les années 1840 dans toute l’Europe. Dès cette époque, la caricature raille les nouvelles religions que représentent les utopies socialisantes, comme le rappelle Michela Lo Feudo. La grande peinture s’engage également : Courbet, grand ami de Proudhon, s’en prend au clergé catholique, dans un tableau qui sera acheté dans le seul but d’être détruit (Vincent Petit). Willette, après lui, attaque le catholicisme, mais aussi les protestants, voire les juifs, avant de se convertir et de créer des images imprégnées de religiosité, mais singulièrement blasphématoires (Laurent Bihl). Durant la Grande Guerre, la religion est instrumentalisée, les dessinateurs font souvent appel à des thèmes religieux pour marquer le fossé moral qui sépare leur pays des belligérants ennemis, dont la religion devient fréquemment synonyme de barbarie (Nicolas Padiou et Bruno de Perthuis).
La caricature des religions ou l’exploitation de sujets religieux à des fins polémiques ne se limite pas à la France. La Belgique voit se développer elle aussi une presse satirique anticléricale au XIXe siècle, dont Anne Morelli repère les différents procédés utilisés pour « déconstruire » l’adversaire. Pour l’Allemagne, Laurence Danguy se penche sur la rhétorique anticléricale de Jugend, analysant en détail à partir d’une caricature le lien qui se tisse dans la célèbre revue munichoise entre politique, art et sacré. Trois articles retracent quelques aspects de la caricature italienne ; dans le premier d’entre eux, Vanja Strukelj s’interroge sur l’origine du langage satirique anticlérical, sur l’influence de la caricature française dans le journal satirique Il Fischietto, notamment dans l’œuvre de Francesco Redenti; dans le second, Francesca Zanella analyse l’emploi de métaphores religieuses durant la Grande Guerre dans la revue turinoise Numero (1914-1922) et parvient à des conclusions voisines de Bruno de Perthuis; Paolo Moretti enfin s’intéresse à la traduction satirique de la sévère bataille qui opposa cléricaux et anticléricaux à l’issue de la Seconde Guerre mondiale à Rome. Dans cette section consacrée aux rapports entre caricature et religion en Europe durant le XIXe et le XXe siècles, Hélène Machinal propose un article original qui met en lumière la remise en cause de la figuration de l’origine (Adam et Eve) dans Punch et l’opinion britannique à la suite de la révolution darwinienne.
Trois études sont ensuite consacrées aux rapports entre « caricature et religion en Asie ». Si celle d’Atsushi Yamanashi rend compte de l’œuvre d’un dessinateur français, Georges Bigot, qui, au Japon, s’en prend à la Société de Marie et à ses œuvres, celles de Louis Gabaude puis de Yue Yue sur la caricature religieuse en Thaïlande et en Chine prouvent à quel point la caricature de la religion ne doit pas être uniquement saisie dans le sens d’une caricature antireligieuse, à quel point les caricatures religieuses n’obéissent pas en Asie aux mêmes critères qu’en Occident.
Dans la dernière rubrique « Autour de Mahomet » sont regroupés huit articles qui apportent différents éclairages, soit sur la réception des caricatures danoises, soit sur la caricature arabe. Les trois premiers (Alain Deligne, Jocelyn Bézécourt et Soufian Al Karjousli) mettent en lumière successivement le caractère émotionnel de la réception des images danoises, les thèmes et cibles dans la caricature de l’Islam et enfin la forme que peut prendre la caricature dans le monde arabe. Les cinq dernières (Enrico Sarnelli, Jean-Claude Gardes, Margarethe Potocki, Joël Kotek et Jane Weston) prolongent ces réflexions en prenant pour objet d’étude le graphisme satirique italien, le discours satirique de la revue allemande Titanic, la caricature iranienne, la caricature arabe et l’image qu’elle donne d’Israël et des Juifs, et enfin pour finir les conséquences de la re-publication des caricatures danoises par Charlie Hebdo en France.
Malgré le grand nombre des contributions proposées, ce volume ne peut prétendre à une quelconque exhaustivité. En raison de la diversité des sujets et des approches – les chercheurs publiés ici représentent des disciplines extrêmement variées -, il nous semble néanmoins que cet ouvrage peut contribuer à mieux saisir l’évolution et la situation actuelle de la caricature (anti)cléricale et (anti)religieuse, à mieux saisir les enjeux des controverses récentes.
Guillaume Doizy et Jean-Claude Gardes
SOMMAIRE ET RESUMES DES CONTRIBUTIONS :
Avant-propos de Guillaume DOIZY, Jean-Claude GARDES : Présentation du dossier « Caricature et religion(s) »
De quelques usages iconoclastes de la religion au cinéma, dans la bande dessinée et les journaux satiriques d’aujourd’hui
Christian MONCELET : La Crucifi xion : quand le Christ est tombé sur un Os à moelle !
Stéphane MAZURIER : L’Anticléricalisme dans les dessins de Charlie Hebdo (1969-1982)
Thomas HOCHMANN : Caricature, blasphème et discours de haine
Philippe KAENEL : Bande dessinée et blasphème au XXe siècle : La Passion du rire
Valentine ROBERT : L’Evangile au miroir deformant du cinéma : la voie décalée de La vie de Brian des Monty Python
Gaïd GIRARD : « Suicide is painless » : les usages iconoclastes de la religion dans MASH de Robert Altman (1970)
Caricature et religion(s) en Europe
Des origines du christianisme au Moyen Âge : une autodérision religieuse ?
Laurence DALMON : La caricature à l’oeuvre dans le discours anti-hérétique des premiers Pères de l’Eglise et sa réception iconographique au haut Moyen Âge
Ileana TOZZI : Dal simbolico Al grottesco: la rappresentazione del Maligno nelle opere d’arte sacra del Museo dei Beni Ecclesiastici della Diocesi di Rieti
Franck THÉNARD-DUVIVIER : Caricature et parodie au seuil des cathédrales (XIIIe-XIVe siècles)
Welleda MULLER : La caricature au plus près du Sacre : le cas des sculptures grimaçantes et irrévérencieuses dans les stalles du XVe siècle en pays bourguignon, fl amand, et
rhéno-mosan
Eglise et caricature à l’époque moderne
Tamara HUNT : Envisioning Terrorists: English Protestant Dissenters and French Revolutionaries
Marina BUJOLI-MINETTI : Caricature et Religion sous George III
Stéphane LAMOTTE : L’affaire Girard-Cadière (1731) : la caricature d’un jésuite et de sa pénitente
Xavier VERT : Caricature et figura
XIXe et XXe siècles en France et en Europe
Michela LO FEUDO : Les « religions » révolutionnaires de 1848 entre caricature et récit excentrique. Le cas des socialistes utopiques
Vincent PETIT : L’anticléricalisme est un art. Le retour de la conférence peint par Courbet et commenté par Proudhon
Laurent BIHL : Adolphe Willette, de la haine du clergé à l’obsession de Dieu
Nicolas PADIOU : Quelques thèmes religieux dans les caricatures anti-allemandes pendant la Première Guerre mondiale
Bruno DE PERTHUIS : Images des dieux et des religions dans la caricature de la Grande Guerre
Anne MORELLI : La caricature anticléricale en Belgique au XIXe siècle : éléments pour une analyse de ses procédés de déconstruction
Hélène MACHINAL : Et Adam devint singe : fi guration de l’origine dans les caricatures de Punch au cours de la seconde moitié du XIXe siècle en Grande Bretagne
Laurence DANGUY : Rhétorique Anticléricale et enjeux sacraux autour d’une caricature de Jugend
Vanja STRUKELJ : Anticlericalismo e satira risorgimentale in Italia: circolazione di modelli e fonti iconografi che ne “Il Fischietto”
Francesca ZANELLA : I santi e la guerra: caricatura in Italia durante la Grande guerra
Paolo MORETTI : La satire anticléricale en Italie durant le deuxieme après-guerre
Caricature et religion en Asie
Louis GABAUDE : La caricature apologétique dans le bouddhisme contemporain en Thaïlande
Atsushi YAMANASHI : Georges Bigot et les caricatures anticléricales contre la Société de Marie
Yue YUE : Le portrait caricatural du moine bouddhiste Ji Gong, représentatif de l’histoire de l’iconographie religieuse en Chine
Autour de Mahomet
Alain DELIGNE : Mahomet caricaturé : texte, image, émotion. Ou : un éclairage dérangeant
Jocelyn BÉZECOURT : Thèmes et cibles de la caricature de l’Islam
Soufi an AL KARJOUSLI : Quelle place pour les caricatures dans le monde arabo-musulman ?
Enrico SARNELLI : Rire des religions dans le monde globalisé : l’image de l’Islam dans le graphisme satirique italien
Jean-Claude GARDES : La réaction « mesurée » de Titanic à l’affaire des caricatures de Mahomet
Margarethe POTOCKI : Peut-on dessiner la schizophrénie ? A propos de la caricature iranienne actuelle
Joël KOTEK : L’image d’Israël et des Juifs dans la caricature arabe contemporaine. Un avatar inattendu de l’antisémitisme moderne
Jane WESTON : A t-on le Droit de rire de tout ? La défense de la laïcité par Charlie Hebdo dans le contexte de l’affaire des caricatures danoises
RÉSUMÉS DES ARTICLES
Christian MONCELET
Le Christ en croix : enfoncer les clous de la dérision
Massonnat et Maxon – deux dessinateurs de l’Almanach de l’Os à moelle (de 1978 à 1981) – ont multiplié des variations sur le motif de la crucifixion.
La caricature bat son plein, sans qu’il soit toujours facile de faire la part de la recherche systématique du gag et de la volonté de ruer dans les brancards d’une idéologie dont l’originalité
se concentre dans l’épisode de la Passion.
Massonnat et Maxon inventent des scènes, plus ou moins abracadabrantes, pour nourrir un révisionnisme burlesque efficace. Ils tirent aussi parti des analogies de forme entre le crucifié et
d’autres personnes modernes (tel un ouvrier et son marteau piqueur, tel un agent de police réglant la circulation dans un carrefour…).
Enfin, le rabaissement de la figure unique du Fils de Dieu s’obtient par la banalisation quantitative (prolifération de crucifiés des plus fantaisistes) et par la banalisation qualitative (on
prête au Christ des réactions bassement humaines).
Cet acharnement potache pourrait s’expliquer par une révolte contre une éducation chrétienne, dans l’esprit de la bande de Charlie Hebdo et de Hara Kiri mensuel.
Christus am Kreuz: Nägel mit Häme
Massonat und Maxon – zwei Zeichner des Almanach de l’Os à moelle (von 1978 bis 1981) – haben zahlreiche Variationen zum Motiv der Kreuzigung geliefert.
Die Karikatur erlebt hier einen Höhepunkt, ohne dass es immer leicht wäre, zwischen einer sytematischen Suche nach Witzeffekten zu unterscheiden und dem Wunsch, gegen eine Ideologie
anzukämpfen, deren Originalität sich auf die Episode der Passion Christi konzentriert.
Massonnat und Maxon erfinden mehr oder weniger tolle Szenen, um einen wirkungsvollen burlesken Revisionismus zu nähren. Sie nutzen auch die Formanalogien zwischen dem Gekreuzigten und modernen
Figuren (wie z.B. einem Arbeiter mit seinem Presslufthammer oder einem Polizisten, der auf einer Kreuzung den Verkehr regelt…).
Schließlich wird die Herabsetzung der einzigartigen Gestalt des Gottessohnes durch eine quantitative Banalisierung (die große Anzahl an völlig frei erfundenen Gekreuzigten) erreicht, sowie
durch eine qualitative (Christus werden niedrigste menschliche Reaktionen unterstellt).
Diese Akribie könnte sich durch die Auflehnung gegen die christliche Erziehung erklären lassen, im Sinne der Charlie Hebdo–Bande und der von Hara Kirir mensuel.
Christ on the cross: hammering in derision
Massonnat and Maxon, two cartoonists for L’Almanach de l’Os à Moelle (from 1978 to 1981) produced numerous variations on the crucifixion theme. Caricature here
pulls no punches, and it is difficult to distinguish between the systematic search for a gag and the will to rebel against Christian ideology and the Passion episode, its most distinguishing
feature.
Massonat and Maxon construct varyingly preposterous scenes to nourish what amounts to burlesque revisionism. They also get as much as possible by drawing analogies of shape between the
Crucified and modern-dday characters (such as a road worker and his pneumatic dreal or a policeman on traffic duty at a cross-road).
Ultimately, the unique figure of the Son of God is discredited through banalisation, both in quantity (a proliferation of supremely ludicrous crucified people) and in quality (Christ is
attributed with basely human reactions).
Such relentlessness could be explained on the grounds of resentment against Christian education, echoing spirit of the Charlie Hebdo and Hara Kiri mensuel group.
Stéphane MAZURIER
L’Anticléricalisme dans les dessins de Charlie Hebdo (1969-1982)
Dans un contexte – les années soixante-dix – où l’anticléricalisme n’est pas un sujet majeur de débats politiques et idéologiques, Charlie Hebdo se montre pourtant très féroce contre le clergé catholique et son influence dans la vie publique. Usant d’un humour provocateur et volontiers grivois, les dessinateurs du journal s’emploient à ridiculiser l’homme d’Église, tour à tour lubrique, ivrogne et malhonnête. Ces joyeux blasphémateurs s’amusent de « la crise catholique », pour reprendre la formule de Denis Pelletier, qui sévit alors, à travers la question du célibat des prêtres, de la dissidence lefebvriste ou de la difficile succession au trône de saint Pierre en 1978. L’anticléricalisme farouche de Reiser, Cabu, Gébé ou Wolinski trouve ses racines dans leur athéisme : « On était tous des mécréants ! », souligne Georges Bernier, directeur de Charlie Hebdo. Il s’explique également par les prises de position de l’Église. Dans le domaine politique, on dénonce le soutien qu’elle apporte à plusieurs régimes autoritaires au nom de l’anticommunisme. Dans le domaine des mœurs, on critique son opposition résolue à la contraception et à l’avortement.
Antiklerikalismus in den Zeichnungen von Charlie Hebdo (1969-1982)
In den 60er Jahren stand der Antiklerikalismus nicht im Vordergrund der politischen und ideologischen Debatten. Trotzdem ritt Charlie Hebdo heftige Attacken gegen den katholischen Klerus und seinen Einfluss auf das öffentliche Leben. Die Zeitschrift praktizierte dabei einen ausgesprochen provozierenden und oft auch schlüpfrigen Humor. Die Zeichner verspotteten die Männer der Kirche als geile, versoffene und unehrliche Figuren. Die fröhlichen Gotteslästerer machten sich auch über die damals grassierende „katholische Krise“ lustig, um eine Wendung von Denis Pelletier aufzugreifen. Angriffspunkte waren das Zölibat der Priester, die integristische Abspaltung um Msg. Lefebvre oder im Jahr 1978 die Schwierigkeiten, einen Nachfolger für den Stuhl Petri zu finden. Der erbitterte Antiklerikalismus der Reiser, Cabu, Gébé und Wolinski beruht auf deren Atheismus – „Wir waren alle Ungläubige!“ betont Georges Bernier, der Direktor von Charlie Hebdo – , aber auch auf diversen Positionen, die die katholische Kirche bezog. Dazu zählte auf dem politischen Sektor deren antikommunistisch motivierte Untersützung für etliche autoritäre Regime. Auf dem Gebiet der Gesellschaftsmoral wurde ihr Eintreten gegen Empfängnisverhütung und Abtreibung kritisiert.
Anticlericalism in Charlie Hebdo’s cartooning (1969-1982)
Whilst anticlericalism did not play a major role in political and ideological debate in the 1970s, Charlie Hebdo was ferocious in its attacks on the Catholic clergy and its influence on the public sphere. With provocative and deliberately licentious humour, cartoonists ridiculed these men of the church for lechery, drunkardness and dishonesty. Revelling in their blasphemy, they made fun of the “crisis of Catholicism”, to quote Denis Pelletier at the time when he was spreading Lefebriste discord over such issues as the celibacy of priesthood or Saint Peter’s troubled succession to the throne in 1978. The ferocious anticlericalism of Reiser, Cabu, Gébé and Wolinski was grounded in aetheism: “We were all unbelievers!” stresses Georges Bernier, director of the publication. An equally significant factor was the politics of the church, and they denounced its support of various authoritarian regimes in its goal of opposition to communism. Meanwhile on issues of morality, they criticised its uncompromising opposition to contraception and abortion.
Thomas HOCHMANN
Caricature, blasphème et discours de haine
Les rapports entre la liberté d’expression et la caricature de la religion sont abordés ici sous trois angles. D’abord, la forme particulière de la caricature permet de préciser le rôle du juge dans l’application des limites de la liberté d’expression, particulièrement dans l’interprétation des propos litigieux. Ensuite, deux types de normes peuvent concerner la caricature de la religion : la répression du blasphème, et la sanction du discours de haine. Au contraire d’autres droits européens, la loi française ne prévoit pas de restriction du premier type. Des juridictions ont cependant été tentées de combler cette absence.
Karikatur, Gotteslästerung und Hassrede
Die Frage, wie Meinungsfreiheit und Karikaturen über Religion sich zueinander verhalten, soll hier unter drei Gesichtspunkten untersucht werden. Zuerst wird die Karikatur als besondere Ausdrucksform beschrieben, mit der die Rolle des Richters näher bestimmt werden kann, wenn es darum geht, die Grenzen der Meinungsfreiheit festzulegen, insbesondere bei der Interpretation von umstrittenen Äußerungen. Zwei Typen von Gesetzen sind dann zu erwähnen, nämlich das Verbot der Gotteslästerung und das der Hassrede. Im Gegensatz zu anderen europäischen Ländern kennt das französische Recht den ersten Typus nicht. Gerichtliche Entscheidungen haben jedoch versucht, diesen Mangel zu beheben, und haben Äußerungen verurteilt, welche die Religion verspotten.
Caricature, blasphemy and hate discourse
The caricature of religion is an interesting case study for the limits of free expression. This article first examines the judicial function in the interpretation of litigious speeches, focusing on caricature as a paradigmatic case. It will then be argued that two types of limits to free speech apply to the caricature of religion: prohibitions of blasphemy and of hate speech. Contrary to other European systems, France does not know any repression of the first type. Nevertheless some tribunals seemed to have forgotten this point.
Philippe KAENEL
Bande dessinée et blasphème au XXe siècle : La Passion du rire
La caricature qui prend Jésus pour cible apparaît sous la Troisième République, notamment à la suite de Vie de Jésus d’Ernest Renan (1863) qui fait de son héros un personnage historique et lui redonne ipso facto un corps, une corporéité. Après 1900, les récits imagés satiriques sur le thème de la Passion s’adaptent à la presse caricaturale qui prend une part active au débat sur la séparation de l’Église et de l’État – en particulier dans L’Assiette au beurre (Bellery Desfontaines, Galanis et surtout Grandjouan). Face au développement de la bande dessinée religieuse depuis les années 1940, les dessinateurs de Pilote, Hara Kiri, Charlie Hebdo, L’Echo des Savanes ou Fluide glacial s’emparent du thème dès les années 1960 (Gotlib, Vuillemin, Larcenet, Planchon…). Trois études de cas souvent polémiques concluent ce bref panorama : le Français Didier Vasseur (alias Tronchet), l’Autrichien Gerhard Haderer et l’Américain Frank Stack (alias Frank Sturgeon).
Blasphemie im Comic des 20. Jahrhunderts: die Lach-Passion
Karikaturen, deren Zielscheibe Jesus ist, erscheinen – in der Folge von Ernest Renans Vie de Jésus (Leben Jesu) (1863) – erstmals in der Dritten Republik. Aus dem Helden des Buchs wird hier eine historische Figur, die über einen Körper, über eine bestimmte Körperlichkeit, verfügt. Nach 1900 passen sich die bildsatirischen Erzählungen der Passionsgeschichte an die satirische Presse an, die sich aktiv an der Diskussion um die Trennung von Kirche und Staat beteiligt. In besonderem Maße gilt das für die Assiette au beurre (mit Bellery Desfontaines, Galanis und vor allem Grandjouan). Seit den 1960er Jahren antworten die Zeichner von Pilote, Hara Kiri, Charlie Hebdo, L’Écho des Savanes und Fluide glacial (Gotlib, Vuillemin, Larcenet, Planchon…) auf die in den 1940er Jahren begonnene Entwicklung des religiösen Comic. Drei Fallstudien beschließen das kurze Panorama. Sie widmen sich dem Franzosen Didier Vasseur (alias Tronchet), dem Österreicher Gerhard Haderer und dem Amerikaner Frank Stack (alias Frank Sturgeon).
A good laugh first : comics and blasphemy in the XXth century
The caricature of Jesus was a new genre born in France under the Third Republic, notably in the wake of the publication of Ernest Renan’s Vie de Jésus (1863) which transformed his hero into someone with a “real” historical body. The political crisis arising from debates on the separation of the State and the Church gave rise to a series of caricatures mocking the Passion (by Bellery Desfontaines, Galanis and especially Grandjouan in the Assiette au beurre). Responding to the development of religious strips from the 1940’s on, the draughtsmen of various periodicals (Pilote, Hara Kiri, Charlie Hebdo, L’Echo des Savanes and Fluide glacial) frequently subverted the Gospels in the 1960’s, 1970’s and 1980’s (Gotlib, Vuillemin, Larcenet, Planchon…). This brief panorama of the caricatural comic strip then turns to three emblematic case studies: the French caricaturist Didier Vasseur (alias Tronchet), the Austrian Gerhard Haderer and the American Frank Stack (alias Frank Sturgeon).
Valentine ROBERT
L’Évangile au miroir déformant du cinéma :
la voie décalée de La Vie de Brian des Monty Python
A l’aune de divers exemples et d’une analyse des Monty Python’s Life of Brian (Terry Jones, 1979), cet article vise à dégager une tendance majeure de l’approche caricaturale du Christ et de l’Évangile au cinéma, consistant à ne pas prendre Jésus pour cible directe de la satire, mais à déplacer la parodie en ses marges. Avec pour prétexte de combler les ellipses du récit biblique et pour précaution de jouer du hors-champ et de dédoublements, les films se plaisent à parasiter la « plus grande histoire jamais contée » par l’ajout d’épisodes démystificateurs ou de personnages-miroirs caricaturaux qui ne prétendent pas remplacer, mais seulement amplifier le texte évangélique. Ainsi, malgré les scandales retentissants provoqués par certains films, et même s’il y est partiellement désacralisé, le Christ au cinéma ne semble jamais se départir d’une certaine dignité et demeure globalement une figure identificatoire.
Das Evangelium im Zerrspiegel des Kinos: Monty Python’s Life of Brian
Anhand einer Analyse des Films Monty Python’s Life of Brian (Terry Jones, 1979) und anderer Beispiele wird in diesem Artikel eine wichtige Tendenz der kinematographischen Karikaturen von Jesus Christus und der Evangelien untersucht. Eine der Haupttendenzen liegt darin, dass nicht Jesus die direkte Zielscheibe der Satire ist, sondern das, was ihn umgibt. Unter dem Vorwand, die Lücken des Evangeliums zu füllen, und mit der ästhetischen Verarbeitung des Raums außerhalb des Bildfeldes und des Doppelgänger-Motivs, neigt der Film dazu, profanisierende Episoden und karikaturale Spiegelfiguren anzubieten, die sich in die „Größte Geschichte aller Zeiten“ eingeschlichen haben. Das Ziel dieses zusätzlichen Stoffes besteht nicht darin, die evangelischen Texte zu ersetzen, sondern diese zu ergänzen. Trotz der von den Fimproduktionen verursachten riesigen Skandale verliert Christus nicht ganz seine Würde und bleibt eine Identifikationsfigur.
The Gospel in cinema’s distorting mirror: the Monty Python’s Life of Brian
Through various examples and an analysis of Monty Python’s Life of Brian (Terry Jones, 1979), this article aims to demonstrate a major pattern in the caricature of Christ and the Gospels in cinema, which consists of taking Jesus not as a direct satirical target, but displacing parody to his margins. With the pretext of filling in biblical narrative gaps, and using off-camera space and character doubles for judicious purposes, films take pleasure in parasiting the “greatest story ever told” through demystifying incidents or the addition of caricaturial minor characters who are not supposed to surplant, but magnify the gospel texts. In this way, despite the huge scandals certain films have provoked, and while there may be partial desacralisation, representations of Christ in cinema never completely remove his dignity or recognisability.
Gaïd GIRARD
« Suicide is painless » : les usages iconoclastes de la religion
dans M.A.S.H. de Robert Altman (USA, 1970)
M.A.S.H. obtint la Palme d’Or au festival de Cannes en 1970 et fit la notoriété de Robert Altman. Cette satire antimilitariste féroce retraçant la vie d’un hôpital
de campagne militaire situé à quelques kilomètres du front de la guerre de Corée qui fit beaucoup rire à l’époque s’ouvrait sur une chanson vantant les mérites du suicide, intitulée « Suicide
is painless ». Cette chanson est reprise in extenso dans une séquence de 8 minutes qui caricature de façon immédiatement repérable la Cène, où Jésus partage son dernier repas avec ses
disciples.
Cet article s’attache à montrer qu’au-delà de la critique à gros traits de rituels le plus souvent catholiques liés à la mort et aux enterrements, la séquence traite aussi du tabou chrétien du
suicide. Dans le contexte politique d’une guerre impérialiste qui mène une partie importante de la jeunesse d’une nation à une mort inutile, l’obscénité est-elle plus du côté des blagues
grossières et sexistes des chirurgiens de MASH ou des milliers de morts du Vietnam ? Le succès inattendu du film pose également la question de la complexité des conditions de réception
inhérente à l’art de la caricature, comme le cinéaste lui même l’a souligné.
„Suicide is painless“ Zum Gebrauch der Religion
in M.A.S.H. von Robert Altman (1970)
M.A.S.H. hat 1970 auf dem Festival von Cannes die Goldene Palme erhalten und den Ruhm Robert Altmans begündet. Diese vehemente antimilitaristische Satire, die
seinerzeit ein großer Lacherfolg war, zeigt das Leben in einem Feldlazarett, ein paar Kilometer von der Front des Koreakriegs entfernt. Sie beginnt mit einem gesungenen Lob des Freitods:
“Suicide is painless”. Das Chanson findet sich dann in extenso wieder in einer achtminütigen Sequenz, die in ganz offenkundiger Weise das Abendmahl parodiert, in dessen Verlauf Jesus seine
letzte Mahlzeit mit seinen Jüngern teilt.
Dieser Beitrag zeigt auf, dass die erwähnte Sequenz nicht nur eine grobkörnige Kritik von religiösen (weitgehend katholischen) Todes- und Begräbnisriten darstellt, sondern sich auch mit dem
christlichen Tabu der Selbsttötung auseinandersetzt. Er stellt die Frage, was obszöner ist: die plumpen und sexistischen Witze der Chirurgen von MASH oder der vieltausendfache Kriegstod in
Vietnam? Der unerwartete Erfolg des Films wirft auch die Frage nach den komplexen Rezeptionsbedingungen auf, die mit der Kunst der Karikatur untrennbar verbunden ist, wie der Regisseur es
selbst betont hat.
“Suicide is painless”: debunking religion
in Robert’s Altman’s M.A.S.H. (USA, 1970)
M.A.S.H. won the Palme d’Or in the 1970 Cannes film festival and made Robert Altman famous overnight. The film is a ferocious satirical piece on the US army,
taking place in a Mobile Army Surgical Hospital located a few miles back from the combat zone during the Korean war ; it made people laugh unreservedly and opened with a song entitled “Suicide
is painless”. This song is heard again towards the middle of the film, in a 8 minute-long sequence which offers a jubilant caricature of the scene of the Last Supper, when Jesus talks to the
apostles for the last time.
This essay aims to show that beyond the graphic -and funny- criticism of religious rituals (mainly Catholic) linked to death and burial, the sequence questions the prohibition of suicide. In an
era when an imperialistic country was sending a sizeable portion of its own youth to useless destruction, are the crass and sexist jokes of the MASH doctors more obscene than the thousands of
deaths of the Vietnam war? The unexpected success of the film also addresses the complex issue of the reception of caricature is concerned, as Robert Altman himself made it clear.
Laurence DALMON
La caricature à l’œuvre dans le discours anti-hérétique des premiers
Pères de l’Église et sa réception iconographique au haut Moyen Âge
Les innombrables controverses où s’engagea le christianisme naissant (IIIe-Ve siècles) traduisent autant d’entreprises de légitimation et de différentiation vis-à-vis de ses adversaires religieux. Si la confrontation avec le paganisme, a fortiori le judaïsme, souligne un véritable enjeu identitaire, sorte de guerre des représentations au sein desquelles la caricature fut naturellement appelée à jouer un rôle primordial, le christianisme dut aussi s’imposer au détriment de courants issus de lui et dénoncés par lui comme centrifuges et déviants : les hérésies. L’enjeu polémique apparaît ici d’autant plus crucial que, dans un conflit où s’affrontent des interprétations concurrentes d’un même message religieux, la victoire est promise au credo qui se montrera le plus habile à discréditer ses rivaux. La caricature doit donc trouver à cette occasion un mode opératoire innovant. S’il lui arrive de puiser au réservoir traditionnel des images repoussoir anti-païennes ou anti-judaïques, le portrait de l’hérétique est bien plus souvent le fruit d’une « hybridation » subtile, d’un jeu de miroirs déformants, sur le thème : l’ennemi de l’intérieur, reflet frelaté, est pire que le païen ou le juif. Essentiellement illustré par des références aux textes des Pères grecs et surtout latins (Augustin, Jérôme), le propos veillera, autant que faire se peut, à ménager une ouverture vers l’iconographie que cette rhétorique d’imprécation a pu inspirer.
Die Karikatur in der anti-häretischen Rede der ersten
Kirchenväter und ihre Rezeption im Hochmittelalter
Die unzähligen Kontroversen, die das entstehende Christentum (drittes bis fünftes Jahrhundert n.Chr.) beschäftigen, zeugen von ebenso vielen Versuchen, sich gegenüber religiösen Gegnern zu legitimieren und sich von ihnen abzusetzen. Zwar war die Konfrontation mit dem Heidentum, und insbesondere mit dem Judentum, eine wahre Identitätsfrage, eine Art Repräsentationsstreit, in dem der Karikatur von Natur aus eine große Rolle zufiel, jedoch musste sich das Christentum auch gegen Strömungen durchsetzen, die ihm selbst entstammten und die es selbst als zentrifugal oder abweichend denunzierte: die Ketzerei. Die Polemik erscheint hier umso wichtiger, als in einem Konflikt konkurrierende Interpretationen derselben religiösen Botschaft aufeinander treffen und der Sieg demjenigen winkt, der mit dem meisten Geschick seine Rivalen in Misskredit zu bringen vermag. Die Karikatur muss daher in dieser Angelegenheit neue Mittel erfinden. Obgleich manchmal auf traditionelle anti-heidnische oder anti-semitische Vorstellungen zurückgegriffen wird, ist das Bild des Häretikers doch eher das Produkt einer subtilen „Kreuzung“, einer deformierenden Spiegelung, ausgehend von der Idee, dass der innere Feind als verfälschtes Abbild weit gefährlicher ist als der Heide oder der Jude. Anhand von Belegen aus den Texten der griechischen und vor allem der lateinischen Kirchenväter (Augustinus, Hieronymus), soll dieser Beitrag ihm Rahmen der Möglichkeiten auch einen Blick auf die Ikonographie eröffnen, die von dieser Verwünschungsrhetorik inspiriert wurde.
Using caricature in the first church fathers’ antiheretical speech.
Reception in the Middle Ages
The innumerable controversies accompanying the beginning of Christianity (IIIe-Ve century) implied just as many attempts of legitimization and differentiation in relation to religious opponents. While confrontation with paganism and equally judaism, underlined a genuine identity issue (something like a war of representations in which a crucial part was naturally assigned to caricature), Christianity also had prevail over doctrinal trends steming from it and being denounced by it as centrifugal and dissenting: heresies. The controversy at stake took on all the more important because bringing into conflict various rival interpretations of the same religious message meant victory would go to those who showed themselves to be the most skilled at discrediting the others. In such a context, caricature had to find new methods. Although traditional anti-pagan or anti-jewish images were sometimes used, portraits of Heretics more often consisted of a subtle “hybridization”, a effect of distorting mirror effect basedon the following theme: the enemy within presented as a kind of dubious reflection, and being worse than the pagan or the Jew. Our argument will be illustrated by references to Greek and especially Latin theologists (Augustinus, Hieronymus); but we will try, as far as possible, to address the iconography generated by this polemical rhetoric.
Ileana TOZZI
Dal simbolico al grottesco: la rappresentazione del maligno nelle opere
d’arte sacra del Museo dei Beni Ecclesiastici della Diocesi di Rieti
Il cristianesimo è unico fra le religioni del Libro a fare ricorso ai codici estetici figurativi per poter meglio illustrare il senso delle Scritture e confortare
la catechesi. La Chiesa delle origini abbandonò la pratica aniconica di tradizione ebraica, suffragata dall’interdetto espresso nel libro dell’Esodo (20,4), per aderire ad uno stile
rappresentativo che conciliò un ricco apparato di segni e simboli con l’eredità realistica di tradizione romana.
Il linguaggio figurativo cristiano assunse nel corso dei secoli una forte connotazione didascalica, diventando uno strumento utile a favorire l’educazione religiosa attraverso la narrazione dei
fatti salienti dell’Antico e del Nuovo Testamento. In età medioevale, l’apparato di segni e simboli si arricchisce e si raffina culminando nella splendida arte rinascimentale.
Ne sono prova, in particolare, le decorazioni delle oreficerie, come dimostra presso il Museo Diocesano di Rieti la collezione di venti croci astili realizzate tra il XII al XVI secolo. Dopo il
XVI secolo, in attuazione dei decreti della sessantaquattresima ed ultima sessione del Concilio di Trento, si fa sempre più frequente invece il ricorso ad una rappresentazione che varia dal
tono drammatico al grottesco, non tanto al fine di viva¬cizzare la scena, quanto piuttosto di renderla inequivocabile, ottenere lo scopo didascalico voluto dalla committenza ecclesiastica e
perseguito con analogo interesse dagli artisti.
Du symbolique au grotesque : la représentation du malin
dans les œuvres d’art sacrées du Musée Diocésain de Rieti
D’entre toutes les religions monothéistes, seul le Christianisme recourt aux codes esthétiques figuratifs pour mieux illustrer le sens des Saintes Ecritures et
soutenir la catéchèse. L’église des origines abandonna la pratique aniconique de tradition hébraïque encouragée par l’interdit exprimé dans le livre de l’Exode (20, 4), et adhéra à un nouveau
style représentatif conciliant un très riche appareil de signes, marques et symboles, et l’héritage réaliste de la tradition romaine.
Le langage figuratif chrétien acquiert au cours des siècles une forte connotation didactique, devenant ainsi un instrument capable de favoriser l’éducation religieuse par l’intermédiaire de
récits marquants issus de l’Ancien et du Nouveau Testament. Au moyen âge, le système de signes et de symboles s’enrichit et s’affine, s’élevant ainsi vers la richesse et la politesse de l’art
de la Renais¬sance.
On peut observer ceci au travers d’une collection de vingt croix proces¬sionnelles réalisées entre le douzième et le seizième siècles, conservée au Musée Diocésain de Rieti. Après le seizième
siècle, et à la suite des décrets de la soixante-quatrième et ultime session du Concile de Trente, on a de plus en plus recours à des représentations dont le ton varie du dramatique au
grotesque, non tant pour animer les scènes que pour les rendre inoubliables et obtenir ainsi le résultat escompté par la société ecclésiastique et poursuivi avec un même intérêt par les
artistes.
Franck THENARD-DUVIVIER
Caricature et parodie au seuil des cathédrales (XIIIe-XIVe siècles)
Un rapide tour d’horizon historiographique permet de repérer les figures de la caricature les plus fréquemment invoquées dans le contexte monumental des
cathédrales : « évêques de mer », renard prêchant aux poules ou encore clercs luxurieux. Mais les interprétations ne sont pas toujours dénuées d’arrière-pensées idéologiques voire empreintes
d’anticléricalisme pour certains (G. Witkowski, début XXe siècle).
La sculpture médiévale tend plutôt à privilégier la déformation ou l’hybridation du corps humain qui bascule ainsi dans le grotesque, l’animalité ou encore le monstrueux. De plus, les procédés
parodiques peuvent être utilisés au service de la dérision ou d’une intention plus satirique. Parmi les cibles de ces images, on trouve le clergé, les pratiques religieuses ou encore les
minorités religieuses (notamment les juifs).
Enfin, la question de l’emplacement de ces images sculptées est essentielle car il détermine à la fois leur réception et leur fonction dans l’espace monumental. Les bas-reliefs des portails
sont placés au seuil des cathédrales, dans un espace de passage entre « sacré » et « profane », et ils sont conçus pour être vus de tous. A l’inverse, les stalles sont au cœur du sanctuaire
mais leur public est limité au clergé canonial. L’espace monumental dans lequel s’insèrent les images détermine largement la question de leur rapport avec la satire, le blasphème, la censure
voire le vandalisme.
Karikatur und Parodie an und in Kathedralen (13./14. Jahrhundert)
Ein rascher Durchgang durch die Geschichtsschreibung gestattet es, die karikaturalen Darstellungen zu identifizieren, die am häufigsten mit Kathedralen in
Verbindung gebracht werden: die sog. Meer-Bischöfe, der Fuchs, der Hühnern predigt, wollüstige Kleriker. Doch die Interpretationen dieser Darstellungen sind nicht immer frei von ideologischen
Hintergedanken, ja in einigen Fällen (wie dem von G. Witkowski zu Beginn des 20. Jahrhunderts) antiklerikal geprägt.
Die mittelalterliche Skultpur bevorzugt die Verzerrung des menschlichen Körpers oder die Bildung von Hybridwesen (Mensch-Tier) und gleitet so ab ins Groteske, Animalische oder Monströse.
Parodistische Verfahren können zudem eingesetzt werden, um etwas oder jemanden lächerlich zu machen oder sogar noch stärker satirisch darzustellen. Zu den Zielscheiben dieser Bilder gehören der
Klerus, bestimmte religiöse Praktiken sowie religiöse Minderheiten (insbesondere die Juden).
Von ausschlaggebender Bedeutung ist die Frage der Lokalisierung der Skulpturen, denn sie entscheidet über Rezeption und Funktion im gesamten räumlichen Kontext. Die Flachreliefs der Portale
befinden sich an der Schwelle der Kathedralen, an einem Ort des Übergangs vom weltlichen in den religiösen Bereich und sie sind dazu bestimmt, von allen gesehen zu werden. Dagegen befindet sich
das Chorgestühl inmitten des Heiligtums und sein Publikum beschränkt sich auf den Klerus. Der räumliche Gesamtzusammenhang, an dem diese Bilder teilhaben, entscheidet über die Art der Beziehung
zu Satire, Blasphemie, Zensur und Vandalismus.
Caricature and parody on cathedral doorways (13th and 14th century)
A rapid historical survey shows that the most frequently invoked caricaturial figures on monumental cathedral edifices were “sea bishops”, foxes who preach to
chickens and clerks living in luxury. But interpretations of these are sometimes coloured by ideological undertones or even explicit anticlericalism in certain cases, as was the case of
G.Witowski at the start of the twentieth century.
Medieval sculpture however tended more towards distortion and hybridization of the human body, opening the door to the grotesque, animality or even the monstruous. Parody moreover was put to
the service of pure derision or more satirical purposes. Included in the targets of these images were the clergy, religious practices and religious minorities such as Jews.
The location of these sculpted images is ultimately a determining factor in both their reception and their fuction as monuments. The bas reliefs of the portals were set at the doorway of
cathedrals, in a transitory space between the “sacred” and the “profane”, and were intended to be seen by all. Conversely, stalls are at the heart of the sanctuary and their public is limited
to the canonical clergy. The monumental space within which these images are located is a key factor for their links with satire, blasphemy, censureship or even acts of vandalism.
Welleda MULLER
La caricature au plus près du sacré : le cas des sculptures grimaçantes et
irrévérencieuses dans les stalles du XVème siècle en pays bourguignon,
flamand et rhéno-mosan
La sculpture des stalles offre plusieurs interrogations de par ses thèmes pour le moins irrévérencieux et caricaturaux dans un lieu aussi sacré que le chœur. Il existe en effet des personnages grimaçants et monstrueux, des exhibitionnistes ainsi que des scènes à caractère scatologique ou des illustrations de proverbes grivois, sculptés sur les miséricordes, les appuie-main ou, dans des cas plus rares, sur les jouées. L’aspect le plus intéressant réside dans les représentations de scènes de caricatures de l’Église elle-même. Ainsi, lorsqu’est représenté un renard déguisé en prêtre, prêchant du haut de sa chaire devant un parterre d’oies ou de poules (cf. jouée de Cuiseaux, Saône-et-Loire, Bourgogne, XVème siècle), nous constatons la capacité d’autodérision dont faisait preuve l’Église en acceptant une telle scène dans son sein le plus sacré : le chœur.
Karikatur in unmittelbarer Nähe des Sakralen: die Grimassen schneidenden und respektlosen Skulpturen im Chorgestühl des 15. Jahrhunderts in Burgund, Flandern und im Rhein-Maas-Gebiet
Die bildlichen Darstellungen im Chorgestühl werfen angesichts ihrer, vorsichtig gesagt, ziemlich respektlosen und karikaturalen Themen an einem so heiligen Ort wie dem Chor mehrere Fragen auf. Wir finden ja an den Misericordien, den Handstützen und gelegentlich auch an den Seitenteilen/ gelegentlich auch an den Zwischen- und Außenwangen Grimassen schneidende und monsterähnliche Figuren, Exhibitionisten sowie skatologische Darstellungen und Visualisierungen anzüglicher Sprichwörter. Am interessantesten sind Darstellungen, in denen die Kirche selbst karikiert wird – etwa wenn ein als Priester verkleideter Fuchs Gänsen oder Hühnern eine Predigt hält (wie im Fall der Seitenteile des Chorgestühls von Cuiseaux im Departement Saône-et-Loire (Burgund, 15. Jahrhundert). Wenn die Kirche eine solche Szene im Allerheiligsten, nämlich im Chor, zulässt, so beweist sie damit, dass sie fähig ist, sich selbst ins Lächerliche zu ziehen.
Caricature in the heart of the sacred: the example of grimacing
and irreverent sculptings in 15th century choir stalls in
the regions of Burgandy, Flanders and Rhéno-mosan
Choir stall sculptings raise many questions through the fact of their unmistakable irreverence and caricatural quality in such a sacred setting as the choir. One finds grimacing, monstruous characters, exhibitionists and scatological imagery, illustrations of licentious proverbs sculpted onto hassocks, armrests or in rare cases, lintels. The most interesting of these are representations of caricatural scenes of the Church itself. So when a fox is presented disguised as a priest preaching from the top of his chair down to a group of geese or chicken in the stalls (see for instance, lintels in Cuisseaux, Saône-et-Loire, Burgandy, XV century), the extent of the church’s ability for self-referential humour in accepting such a scene at its most sacred heart, the choir stalls, becomes apparent.
Tamara HUNT
Regards sur des terroristes : les Dissidents protestants
anglais et les Révolutionnaires français
Pendant tout le XVIIIe siècle, les symboles les plus marquants du radicalisme politique furent le régicide du XVIIe siècle Oliver Cromwell et les protestants non-conformistes, appelés « Dissidents », régulièrement représentés dans la caricature comme plébéiens, moralisateurs hypocrites et séditieux en puissance. Le soutien public apporté en 1789 par d’importants Dissidents anglais aux Révolutionnaires français poussa les caricaturistes à transformer les images traditionnelles des Dissidents originaires des classes inférieures en révolutionnaires plébéiens français. Il y eut là une évolution aboutissant en fin de compte au passage d’un monde politique orienté vers la religion à un monde où les différences de richesse et de statut social devenaient le souci premier. Si, au début, les Révolutionnaires français de 1789-90 gardèrent une certaine ressemblances avec les Dissidents, l’image des boutefeux sans-culotte devint le fondement de celle des radicaux anglais du XIXe, animés par une idéologie séculière.
Bilder von Terroristen : die englischen protestantischen
Dissidenten und die französischen Revolutionäre
Während des 18. Jahrhunderts waren die prägnantesten Symbole des politischen Radikalismus zum einen Oliver Cromwell, der Königsmörder des 17. Jahrhunderts, und zum anderen die protestantischen „Dissidenten“, die in Karikaturen systematisch als Plebejer, scheinheilige Moralprediger und potentielle Aufständische dargestellt wurden. Die öffentliche Unterstützung, die die französischen Revolutionäre 1789 von führenden englischen Dissidenten erfuhren, führte die Karikaturisten dazu, die herkömmlichen Darstellungen der sozial niedrig stehenden Dissidenten in Bilder plebejischer französischer Revolutionäre zu verwandeln, eine Entwicklung, die im Grunde einen Sprung von einer Welt, die sich in ihrer Politik nach der Religion ausrichtete, zu einer anderen Welt, in der finanzielle und soziale Unterschiede die wichtigsten Angelegenheiten wurden. Während die französischen Revolutionäre von 1789-1790 anfangs gewisse Ähnlichkeiten mit den Dissidenten hatten, wurde das Bild der aufrührerischen Sansculotten die Grundlage für die Darstellung der englischen Radikalen des 19. Jahrhunderts, die einer weltlichen Ideologie folgten.
Envisioning Terrorists: English Protestant
Dissenters and French Revolutionaries
Throughout the eighteenth century, the most potent symbols of political radicalism were the seventeenth-century regicide Oliver Cromwell and Protestant non-conformists, or “Dissenters” who were routinely depicted in caricature as plebeian, sanctimoniously hypocritical, and potentially seditious. Public support for French Revolutionaries by leading English Dissenters in 1789 led caricaturists to transform traditional images of lower-class Dissenters into plebeian French revolutionaries, a development that ultimately represented a leap from a religiously-oriented political world into one where differences in wealth and status became the primary focus. While similarities with the Dissenters initially tainted the French revolutionaries in 1789-90, the image of the firebrand sans-culotte formed a foundation for the image of nineteenth-century English radicals driven by secular ideology
Marina BUJOLI-MINETTI
Caricature et Religion sous George III
En cet « âge d’or » qu’est le règne de George III pour la caricature, les adversaires politiques s’affrontent par images interposées, valorisant leurs idées et dénigrant celles de leurs opposants en utilisant, parmi d’autres thèmes, la Religion. Par des termes choisis dans les titres, légendes, bulles et textes de leurs satires, et en représentant la Bible, les symboles chrétiens, le clergé, ses attributs, ses sacrements, ses Églises, la diversité des croyances et l’existence de mécréants, ainsi que la dualité du monde terrestre, entre Ciel et Enfers, les auteurs indiquent à celui qui contemple leur œuvre quel parti adopter. Bien qu’ils relèguent souvent les références religieuses en éléments annexes, la présence diffuse et multiforme de la Religion témoigne de sa force discursive indiscutable et traduit le degré d’imprégnation religieuse d’une société où le respect de la foi reste essentiel.
Karikatur und Religion unter George III
Die Regierungszeit von George III. war ein Goldenes Zeitalter für die Karikatur. Die politischen Gegner griffen sich bildlich an, betonten auf diesem Weg den Wert ihrer Ideen und machten die ihrer Gegner verächtlich. Sie bedienten sich dabei neben anderen Themen auch der Religion. Religiöse Begriffe in den Titeln, Legenden, Sprechblasen und Texten ihrer Bildsatiren sowie Darstellungen der Bibel, christlicher Symbole, des Klerus und seiner Attribute, der Sakramente, der Kirchen und der verschiedenen Glaubensrichtungen sowie der Tatsache, dass es Ungläubige gibt, aber auch Bilder der Dualität der irdischen Welt zwischen Himmel und Erde zeigen dem Betrachter ihrer Werke, wofür und für wen er Partei ergreifen soll. Auch wenn die religiösen Anspielungen oft in Nebenaspekten der Darstellung auftauchen, beweist die diffuse und vielgestaltige Präsenz der Religion, wie sehr diese über eine unbestreitbare diskursive Macht verfügte. Sie zeigt auch, wie sehr diese Gesellschaft von Religiosität durchdrungen war und den Glauben respektierte.
Caricature and religion under George III
The reign of George III coincided with a “golden age” of caricature, and political opponents waged battle by means of this kind of imagary, defending their own points of view and denigrating those of their opponents on various topics, including religion. Authors used carefully chosen satirical titles, headings, speech balloons and texts to discuss the bible, Christian symbols, the clergy, sacraments, the Church, diversity of beliefs including the existence of non-believers, as well as the duality of earthly existence between heaven and hell, all of which was meant to indicate to readers which side they should choose. Although they often relegated religious elements to a secondary status, their widespread and diverse presence demonstrated their indisputable discursive power, as well as the extent to which religion was integrated into a society where respect of the faith remained essential.
Stéphane LAMOTTE
L’affaire Girard-Cadière (1731) : la caricature d’un jésuite et de sa pénitente
Le Père Girard, jésuite, nommé recteur du Séminaire Royal de la Marine de Toulon en 1728, est accusé d’avoir séduit une de ses pénitentes, la jeune Catherine Cadière, en profitant de l’intimité de la confession. Ce qui aurait dû rester un simple fait divers devient rapidement objet de scandale, lors d’un retentissant procès au parlement d’Aix-en-Provence en 1731. Ce dernier suscite de nombreux écrits – factums, articles des Nouvelles ecclésiastiques, ou libelles – ainsi que des estampes qui témoignent de la passion et des perceptions de l’opinion publique. Cette affaire s’insère dans le contexte de la controverse entre les jansénistes et les jésuites qui bat son plein dans les années 1730, lors des événements convulsionnaires qui se déroulent sur la tombe du diacre Pâris. Les images satiriques et leurs légendes permettent de tourner en dérision les enjeux religieux de l’affaire, jouent sur le double sens des paroles du jésuite, qui puise dans l’argumentaire quiétiste pour justifier son appétit érotique et mettent en scène de façon parodique la lutte entre les deux partis. Sujet romanesque et théâtral, où les éléments de fiction s’ajoutent souvent aux faits réels, cette affaire Girard-Cadière est du « pain béni » pour une caricature qui ne cesse de s’entretenir jusqu’à nos jours dans des amplifications et déformations mémorielles, iconiques ou textuelles.
Die Affäre Girard-Cadière (1731):
die Karikatur eines Jesuiten und seines Beichtkindes
Der 1728 zum Rektor des Königlichen Marine-Seminars von Toulon ernannte Jesuitenpater Girard wurde beschuldigt, eines seiner Beichtkinder, die junge Catherine Cadière, unter Ausnutzung der intimen Beichtsituation verführt zu haben. Was eine unbedeutende Nachricht hätte bleiben sollen, wuchs sich 1731 im Kontext eines Aufsehen erregenden Prozesses vor dem „Parlement“ von Aix-enProvence rasch zum Skandal aus. ZahlreicheTexte – Streit- und Schmähschriften sowie Artikel in den Nouvelles ecclésiastiques – und grafische Darstellungen bezeugen die Leidenschaftlichkeit und die unterschiedlichen Wahrnehmungsweisen der öffentlichen Meinung. Zum Kontext dieser Affäre gehört die Auseinandersetzung zwischen Jansenisten und Jesuiten, die in den 1730er Jahren ihren Höhepunkt erreichte, im Zusammenhang mit den Ereignissen auf dem Grabmal des Diakons Pâris. Die Bildsatiren und ihre Legenden ziehen die religiösen Aspekte dieser Affäre ins Lächerliche. Sie spielen mit dem Doppelsinn der Worte des Jesuiten, der quietistische Argumentationen verwendet, um seine erotische Begehrlichkeit zu rechtfertigen, und sie setzen die Auseinandersetzung zwischen beiden Parteien parodistisch in Szene. Diese Affäre mit ihrem romanhaften bzw. wie fürs Theater geschaffenen Sujet und den fiktiven Elementen, die sich gern zu den Fakten gesellen, ist geradezu ein Segen für die Karikatur, die bis heute in Bild und Text von aufgeblähten oder verzerrten Erinnerungen lebt.
The Girard-Cadière affair (1731):
the caricature of a Jesuit and his female penitent
Father Girard, a Jesuit, appointed rector of the Royal Navy Seminary of Toulon in 1728, was charged with having seduced one of his penitents, young Catherine Cadière, by taking advantage of the secret of confession. What ought to have remained a trivial event soon turned into a scandal in the context of a sensational lawsuit at the Parliament of Aix-en-Provence in 1731. The case provoked a great deal of written pieces – lampoons, articles in Nouvelles ecclésiastiques, and various other satirical texts – as well as etchings, showing the commotion raised by the case, and the way it was perceived by the public. The affair took place during the controversy between Jansenists and Jesuits which developed in the 1730s on the subject of the convulsionary crises at the tomb of Deacon Pâris. The satirical images and their captions would deride the religious dimension of the case, playing on the double meaning of the Jesuit’s words, who resorted to quietism so as to vindicate his erotic appetite, and they also presented the struggle between the two parties in a parodical light. Both novelistic and dramatic, often mixing fictitious elements with real facts, the Girard-Cadière case was a godsend for a certain kind of caricature which has continued to this day, magnifying and distorting memories, images and texts.
Xavier VERT
Caricature et figura
Parmi les stupéfiantes caricatures dues au Bernin, il en est une qui représente un pape. L’analyse qu’en a donné l’historien de l’art Irving Lavin , pour remarquable qu’elle soit, ignore cependant le lien profond qui relie la « charge » aux enjeux dont le corps du vicaire du Christ est l’objet : rituels d’humiliation et de mortification accomplis lors du possesso, injures, violences obscènes et molestations perpétrées sur le cadavre du pape, constituent les événements majeurs auxquels se rapporterait le portrait-charge de Bernin, projetant la figure-dépouille d’un pape vivant. La ressemblance avilissante et grotesque ne saurait être qu’un moyen de critique sociale, replacée dans le contexte liturgique, rituel et prophétique, elle a aussi pour effet de rétablir le pape dans la conformité au Christ. Le portrait réalisé par Bernin condense figura et contre-figure bouffonne d’un pape.
Karikatur und figura
Unter den verblüffenden Karikaturen von der Hand Berninis befindet sich eine Papst-Karikatur. Der Kunsthistoriker Irving Lavin hat eine bemerkenswerte Interpretation dieser Zeichnung vorgelegt, dabei aber übersehen, wie sehr die “charge” (im etymologischen Sinn von charger bzw. caricare: beladen, belasten, übertreiben) mit dem Körper des Stellvertreters Christi und dessen Bedeutungen verbunden ist. Gemeint sind damit die Erniedrigungs- und Demütigungsrituale, die im Rahmen des possesso vollzogen werden. Die Beleidigungen, die obszönen Gewalthandlungen und Belästigungen, die am Leichnam des Papstes vorgenommen werden, sind wesentliche Vorgänge, auf die sich Berninis Porträtkarikatur beziehen dürfte, indem sie diese auf einen lebenden Papst sein Bild als Leichnam projiziert. Die erniedrigende und groteske Ähnlichkeit ist gewiss nicht nur ein Mittel der Sozialkritik, sondern sie bewirkt – wenn man sie in ihrem liturgischen, rituellen und prophetischen Kontext betrachtet – auch die Angleichung des Papstes an Christus, seine formale Ähnlichkeit (Kon-formität) mit ihm. Das Bernini-Porträt stellt ein Kondensat aus figura und komischer Anti-figura eines Papstes dar.
Caricature and figura
Of the many striking caricatures within Bernin’s corpus, one depicts a pope. The art historian Irving Lavin made a remarkable analysis of this work, but nevertheless neglected the deep relationship between the “loading” of the caricature and the bodily issues at stake for this servant of Christ. Humilation rituals, mortification taking place as part of the possesso, insults, obscene violence and molestation of the corpse of the pope are the major events to which Bernin’s caricature refers, whilst presenting the symbolic remains of a living pope. This degrading and grotesque rendering should be read as a social critique transposed into a liturgical, ritual and prophetic setting, whilst presenting the pope’s situation as analogous to that of Christ. Bernin’s portrait condenses the figura with the clown-like, counter-figure of the pope.
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Autres ouvrages sur la caricature
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(1) 21 septembre 2006. A notre connaissance, aucune publication n’a été tirée de ces deux événements.