Le début d’année voit fleurir les recueils de dessinateurs de presse, et c’est tant mieux. On ne s’étonnera donc pas que nous évoquions le 8e du genre, du dessinateur Kak, qui vient de paraître. Comme son nom l’indique, « Covid de répétition » n’échappe pas à la dictature de l’actualité qui a mis la pandémie au centre des préoccupations médiatiques. Nombre de dessins portent donc sur ce sujet, ce qui permet, pour les nostalgique, de revisiter l’année passée en s’amusant, avec le recul, de la manière dont nous nous sommes enkystés dans la crise, mais également par quels jeux métaphoriques et quels traits d’humour Kak, a cherché à amuser et titiller le lecteur. La sélection de dessins ne se résume pas à la seule pandémie. D'autres sujets sont évoqués, autant sur la politique internationale que nationale.
Les quinze dernières pages du recueil intéresseront tout particulièrement les passionné.e.s de dessin de presse. Kak y détaille en effet certaines de ses recettes, de ses sources d’inspiration, et d’autres petites friandises. C’est le cahier spécial « le détail qui tue ». Dans la grande tradition du dessin de presse, Kak s’amuse en effet à associer à ses cibles des attributs récurrents, rosette pour Macron, catogan de Mélanchon, rat d’Hidalgo, etc., en expliquant l’origine de l’association, qui peut perdurer sur des périodes plus ou moins longues. Un événement médiatique préexiste évidemment systématiquement à cette « cristallisation » du motif, événement sans lequel l’association n’aurait pas de sens. Nombre de ces cristallisations ont permis aux dessinateurs d’enrichir les personnages caricaturés. Plus proche de nous, on peut évoquer les fameuses talonnettes de Sarkozy, qui se sont imposées dans la caricature seulement après que le Canard enchaîné a publié une photo en plan américain bidonnée montrant Sarko et Bush devisant debout face-à-face, les visages au même niveau. Alignement impossible, Sarko mesurant plusieurs dizaines de centimètres de moins que l’américain. Sarko avait donc escaladé une estrade, ce qui révélait un net complexe d’infériorité !
Dans l’histoire de la caricature, d’autres événements fameux ont permis ces rencontres improbables entre une cible et un « détail qui tue ».
Dans ce cahier spécial, on découvre que Kak, qui travaille depuis 2014 pour L’Opinion, « dans la lignée de Faizant et comme nombre de ses confrères », invoque souvent l’allégorie républicaine Marianne. La référence à Faizant n’est pas inintéressante, car il s’agit d’un des rares dessinateurs de droite de ces dernières décennies dont on se souvienne encore. Faizant officiait au Figaro qui ne l’a hélas pas remplacé après son départ. Dommage, car par le passé, le dessin de presse de droite a été parfois flamboyant (voir notamment le grandissime Sennep). Kak explique d’ailleurs que la plupart du temps il n’exprime pas d’opinion personnelle dans ses dessins, mais cherche principalement à faire rire et à titiller le lecteur. Il s’inscrit donc dans une tradition du dessin de commentaire ou « éditorial » qui prédomine dans la « grande » presse quotidienne. Enfin, le cahier spécial explique que Kak multiplie les caricatures de personnes de son entourage dans ses dessins d’actualité, lorsqu’il s’agit de camper des anonymes.
Bref, voilà un recueil bien savoureux qui lève un peu le voile sur les facéties du dessinateur et ses recettes de cuisine. On aimerait en savoir encore plus !

Le Kak 40 de L’Opinion, tome 8, « Covid de répétition », 2022, 14,90 euros.

Guillaume Doizy

Tag(s) : #Comptes-rendus recueils
Partager cet article
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :