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Par  Mira Falardeau

« L’humour visuel au Québec », Humoresques n°25, Spécial Humour Québécois, Paris, CORHUM-Centre National du livre,  n° 25, 2007, p. 33-53.


Les débuts
L’humour a sûrement une grande place dans la résistance farouche des Québécois aux tentatives d’assimilation soit de la part du Canada anglais, soit de la part de leurs voisins du Sud, les Américains. Assimilation pas seulement politique mais aussi culturelle. On verra comment, tel le petit village gaulois bien connu, le Québec a su résister tout au long de son histoire aux envahisseurs de tous horizons, aidé en cela par plusieurs formes d’humour visuel typique où les gens se plaisent à se retrouver mais aussi à se définir. Comme plusieurs petites nations, le Québec aime rire en famille. En fait, l’humour visuel québécois — on parle ici de caricatures, de dessins d’humour, d’histoires en images, puis de bandes dessinées et d’animation soit en dessin, soit par ordinateur —  l’humour visuel québécois, donc se distingue par trois grandes tendances. Qui expliquent sa vigueur et son rayonnement.
Tout d’abord, une constante, c’est un humour engagé. Un humour qui parle fort et prend position dans tous les grands débats. Puis, c’est un humour grand public. Ces deux tendances ne vont pas toujours ensemble, souvent même, s’affrontent. Dans certains pays, l’humour engagé est peu diffusé, soit par crainte des représailles, soit tout simplement, parce qu’il s’adresse à un public limité. Enfin, les cartoonistes depuis les tous débuts vont allègrement d’un langage à l’autre, sautant de la caricature à la BD, du dessin d’humour à l’animation, se situant souvent à l’avant-garde des innovations techniques.
Au départ, les Canadiens français subissent trois influences majeures : anglaises, françaises et américaines. Les premières caricatures connues (1) produites en sol québécois sont l’œuvre d’un jeune lieutenant anglais, George Townsend, caricaturiste à Londres avant la guerre de conquête, qui s’adonnait à ce passe-temps pendant le siège de Québec en 1759 aux côtés du général Wolfe. La bataille des Plaines d’Abraham, celle qui fit perdre la Nouvelle-France à la France, est curieusement évoquée par les moqueries désobligeantes de Townsend envers son supérieur. Dans la caricature « Cherchez la femme , Searching for spies »,  le jeune (il a 25 ans !) Wolfe se penche avec dédain vers les sièges d’aisance dans un pas de ballet gracieux en regardant à travers sa lunette d’approche, un mouchoir parfumé à la main, en disant dans une bulle au français élégant : « Évidemment, les espions puants sont ici ! Plus de trahison ! Et puis, une dame ! »  Le jeune Townsend était certainement au fait des estampes caricaturales du graveur anglais Hogarth (1697-1764).
Les premiers graveurs du Bas-Canada étaient allemands, tel ce Hochstetter qui publie ses gravures  à partir de 1792 dans divers journaux tels La Gazette de Québec (1764-1874) et Le Magasin de Québec (1792-1794).  Hochstetter fournit aussi les marchands d’estampes, qui battent la campagne, en gravures de toutes sortes. Un autre graveur d’origine européenne, Augustus Leggo signe des caricatures avec bulles et transmettra son savoir à toute une génération de jeunes dessinateurs dont Henri Julien (1852-1908), caricaturiste célèbre de la fin du 19e siècle et des débuts de la grande presse. On  attribue à Leggo la première caricature avec bulles mettant en scène des personnages publics dans Le Journal de Québec, en 1850 : «La ménagerie annexionniste». Le procédé de Leggo est caractéristique de la caricature naissante : il ridiculise les partisans d’une annexion du Canada avec les Etats-Unis en les affublant de corps d’animaux emblématiques. On y voit entre autres le peintre Joseph Légaré zozoter : «Je suis…T…annexionniste » coiffé d’un bonnet d’âne, rapportant un réel pataquès que le pauvre homme aurait commis la veille en public.

Une soixantaine de journaux satiriques aux noms savoureux (La Scie, Le Charivari, le Grognard) vont naître et mourir dans les seules villes de Québec et de Montréal entre la révolte des Patriotes de 1837— qui indique aux dirigeants anglais que les Canadiens français désirent participer à leur destin — et l’avènement de la Confédération en 1867 – qui regroupe les provinces fédérées en un pays du Canada tel qu’il existe encore (2). La plupart des caricaturistes de l’époque viennent y apprendre leur métier dans la plus grande convivialité. En effet, les premiers caricaturistes signent rarement leurs dessins et premières histoires en images par crainte des représailles. Ce n’est que par déduction et recoupements que l’on peut mettre des noms maintenant connus aux pseudonymes de l’époque. On assiste à la naissance d’une véritable presse d’opinion dans une explosion de titres satiriques où se côtoient de très jeunes créateurs qui deviendront de grands écrivains tels Arthur Buies et des artistes talentueux, l’ensemble s’amusant à qui mieux mieux des gaucheries du monde politique.
En 1866, La Scie illustrée, journal satirique de la ville de Québec violemment opposé au projet de confédération canadienne, publie la première histoire à suivre. Jean-Baptiste Côté, qui sera un sculpteur de renom, y grave d’un numéro à l’autre la triste histoire de «Baptiste Pacot», fonctionnaire au zèle douteux. La raideur des gestes due à la gravure sur bois crée un effet de pantomime, à la façon des marionnettes, propre à la plupart des narrations illustrées des premiers journaux satiriques. L’influence graphique des Français Cham et Nadar n’est pas loin. Côté fera de la prison pour cette première histoire en images insolente.

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Illustration 1 : Jean-Baptiste Côté, «Baptiste Pacot, employé civil»,  La Scie illustrée, mars 1866.

 Sans  trop schématiser, disons tout de même que les Canadiens Français comme on les appelait à l’époque s’inspirent des caricatures anglaises, des histoires en images françaises et bientôt des BD américaines. Ils vont concocter avec l’ensemble une espèce d’humour typique dans lequel ils aimeront se retrouver et se définir. Un des plus bel exemple en est cette manie d’appeler les héros Baptiste.
C’est dans Le Canard, le journal satirique de Montréal qui a eu la plus longue vie malgré des interruptions (1877-1957) qu’a été campé le premier héros  typiquement de chez nous, né dans la caricature, puis  développé dans les histoires en images et dans la bande dessinée, sous au moins 4 signatures différentes : Baptiste Ladébauche. Le fondateur du Canard,  Hector Berthelot, est un homme-orchestre. Il en est l’éditeur, écrit des textes, bâtit les scénarios des histoires en images enfin, dessine parfois. Le succès du Canard est rapide : 500 exemplaires en octobre 1877, 5000 en novembre de la même année, 15,000 en 1879. L’hebdomadaire contient beaucoup de rébus et de dessins allégoriques, mais surtout une vive critique politique, qui emprunte un ton familier comme si l’auteur s’adressait directement au lecteur. Berthelot est hyperactif et vend son Canard pour démarrer d’autres canards : Le Vrai Canard (1879), Le Grognard (1881), Le Violon (1886). Les dessins et histoires en images non-signés du Canard, du Grognard , du Vrai Canard, du Violon sont de lui, soit idée et dessin, soit idée seulement. Pressé par le temps, il en confie souvent la réalisation et la gravure à ses collaborateurs : Morissette, A.S.Brodeur, caricaturiste à La Presse à partir de 1891, à A.G.Racey et Henri Julien, tous deux caricaturistes au Montreal Star. Ainsi, loin d’être en compétition malgré le fait qu’ils travaillent pour des journaux compétiteurs, les caricaturistes du 19e siècle apprennent leur métier ensemble, élaborent en équipe des histoires en images où les divers codes de la bande dessinée à naître sont explorés : les lignes de mouvement pour appuyer les changements de position, les bulles et onomatopées diverses pour symboliser les sons et les bruitages, une typologie grotesque où les êtres sortent tout droit du théâtre de variétés, le garnement, la mégère, le gaffeur, la belle, mais revus à la sauce du terroir.
 
La première BD de langue française
La naissance de la bande dessinée coïncide avec l’apparition des grands quotidiens à l’aube du 20e siècle. Son immense succès tient à la fois de l’universalité de ses thèmes et de sa facilité de lecture. En effet, la bande dessinée est un atout considérable dans la conquête d’un public souvent analphabète. De 1890 à 1900, les journaux québécois se modernisent, sous l’impulsion des partis politiques qui les financent allègrement. La linotypie, procédé ultra-rapide, remplace désormais la composition à la main. Les dessinateurs ne se voient plus contraints de graver eux-mêmes leurs dessins. Leurs œuvres sont reproduites grâce à la photogravure, qui permet de rassembler dans une même page dessins, photographies et textes. Les illustrations humoristiques accompagnées de légendes sont de plus en plus populaires auprès des lecteurs. Ils se reconnaissent dans les situations cocasses, illustrant les thèmes de la famille, du mariage, de la situation économique. Ils prennent l’habitude d’acheter des recueils des meilleurs dessins, ancêtres de nos comics books, à la mode américaine. Raoul Barré (1874-1932) signe la chronique drolatique «En roulant ma boule» à La Presse de Montréal. Il rassemble un choix d’histoires en images avec bulles dans son recueil du même nom En roulant ma boule (Déom Frères, 1901). Ses personnages dynamiques et rondouillards aux contours très forts préfigurent l’intérêt que Barré portera  quelques années plus tard au dessin animé.

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Illustration 2 : Raoul Barré, «Histoire de sauvage, En roulant ma boule», La Presse, Montréal, Déom Frères, 1901.
 
Si les premiers héros de la bande dessinée naissante américaine sont des enfants, Yellow Kid de Outcault (New York World, 1896), les Katzenjammer Kids (Pim, Pam, Poum en France) de Dirks (American Humorist, 1897), les héros québécois sont des adultes, parfois accompagnés d’enfants, ce qui permet une double lecture nourrie par des double sens. Ainsi on assiste non seulement à la naissance d’un langage original, mais surtout à un discours marqué par les grands thèmes et débats de l’heure, le tout épicé par une saveur du terroir assez particulière. Si Barré de même que Julien sont allés en France étudier et publier aux débuts de leurs carrières respectives, ce sont tout de même les États-Unis qui influenceront davantage les Québécois en ce qui concerne la popularité et la diffusion de la bande dessinée. Dès les tous débuts, les quotidiens donneront aux dessinateurs des premières bandes dessinées des moyens inusités pour l’époque, soit la possibilité de publier des pleines pages en couleur dans des quotidiens, soit une page de fin de semaine. Le premier grand bédéiste québécois, Albéric Bourgeois (1876-1962) apprend son métier aux Etats-Unis. Il produit des bandes dessinées pour le Boston Post en 1902 lorsque l’éditeur de La Patrie, financé par le parti libéral, monsieur Tarte, le rappelle à Montréal en lui offrant le contrat type des caricaturistes de l’époque : la caricature éditoriale et une histoire en images ou une bande dessinée en couleurs en fin de semaine. Quel travail !
Les premières aventures de Timothée, dandy de son état, paraissent  le 30 janvier 1904, et le héros restera attitré à ce journal.

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Illustration 3 : Albéric Bourgeois, «Dans les griffes de la justice» (haut de la page) dans «Les Aventures de Timothée»,  La Patrie, Montréal, 12 mars 1904, quatre couleurs.
Texte des bulles :
Case1 : Avocat 1 - Vous êtes blanc comme neige. $2. seulement.
             Avocat  2 - Vous n’êtes pas coupable. Je peux vous sauver pour $1.
Case 2 : Avocat 1 – 50c, jeune homme.
              Avocat 2 – 25c, mon ami.
Case 3 : Avocat 1 - Monsieur est mon client.
              Timothée – Calmement.
              Avocat 2 – Pardon, mon savant confrère. C’est le mien.
Case 4 : Avocat 1 – Vous êtes une fripouille.
              Avocat 2 – Et vous, un crétin.
Case 6 : Avocat 1 – Il a insulté le barreau !
             Le juge - $5. ou 8 jours. Et ne recommencez plus.
             Policier – Il s’est moqué de la police.
             Timothée – Au contraire.
Bourgeois se serait inspiré des visages de personnages célèbres de son époque  et les traits de son héros Timothée, à la langue crue mais savoureuse, mélange d’un joual — sorte de franglais — et d’une langue française sertie de vieux mots, reproduiraient le faciès d’Olivar Asselin, journaliste de combat bien connu des milieux journalistiques.

En lançant Timothée dans les griffes de la justice, Bourgeois se lance dans l’illustration d’une bataille rangée entre deux avocats. Plus inspiré par les masses noires des toges que par les prouesses oratoires de ses protagonistes, il brosse une danse élégante où les aplats de noir relevés de plis blancs se découpent sur un fond vert lime, assaisonné d’étoiles bleutées et du costume rouge carmin de l’accusé. Art de l’instantané, la bande dessinée des journaux quotidiens a rarement bénéficié de tant de soins dans l’exécution et l’impression. Le grand sens artistique de Bourgeois évoque Winsor McCay et son Little Nemo in Slumberland (New-York Herald, 1905)
 Le journal concurrent de Montréal, La Presse réplique à La Patrie en amorçant en mars 1904 la parution d’une autre série illustrée signée Charlebois, redonnant un visage à Baptiste Ladébauche , nom de plume de Berthelot dans le Canard ! Mais le plus cocasse de l’histoire est que le journal La Presse, voyant le talent prolifique de Bourgeois puisque ce dernier signe maintenant deux bandes dessinées en couleurs par semaine en plus de son travail de caricaturiste, le débauche c’est le cas de le dire en lui offrant un an plus tard, en mars 1905, le même contrat type. Bourgeois devient donc le caricaturiste le plus prolifique de son époque puisqu’il restera à La Presse jusqu’en 1954. En déménageant, Bourgeois hérite du héros attitré de La Presse, ce cher Baptiste Ladébauche et il en fait un grand homme, ni plus ni moins. Si Baptiste a plutôt l’attirail du fermier débarqué en ville au départ, il gravit les échelons de la société sans doute au même rythme que son auteur et prend de grandes allures, fume le cigare, porte beau avec des complets à la dernière mode, a toujours le dernier mot sauf face à sa femme Catherine qui porte les culottes, comme on dit ici. Baptiste Ladébauche sera successivement ou parallèlement héros des caricatures, des bandes dessinées mais aussi de chroniques illustrées  plus politisées telles Les voyages de Ladébauche autour du monde, où le truculent personnage s’entretient candidement avec tous les grands de ce monde en leur donnant son opinion sur tous les sujets chauds de l’heure. «Baptiste et Catherine» se retrouvent enfin sur la scène du théâtre de variétés du Théâtre St-Denis en 1926, et inspirent un radio feuilleton signé par leur auteur, Joson et Josette, à partir de 1932.  Et puis, il y a ce Ladébauchoscope mystérieux dont nous avons trouvé des traces dans une recherche sur le cinéma d’animation. Que se cache derrière ce nom ? Une salle de cinéma ou de lanternes magiques avec notre héros ? La recherche reste à faire.
Mais encore plus typique de notre tendance communautaire, Bourgeois aime tant ses héros et son métier qu’à ses débuts à La Presse, il poursuit tout de même sa collaboration avec ses amis de La Patrie et continue à dessiner son Timothée (1904-1908) avec Théophile (Hyacinthe Marie) Busnel (1882-1908) . Dans la plus pure convivialité artistique, en plus de son Ladébauche (1904-1954), Bourgeois campera une foule de héros dont les méchants garnements Toinon et son cousin Polyte, leur bonne Aglaé. À La Patrie, Béliveau invente un autre Baptiste, Citrouilllard (1904-1906) celui-là, clin d’œil à La famille Fenouillard du Français Christophe, et sa femme Pétronille, leur fils Gugusse et le vieux Père Nicodème. La coopération va si loin que l’on peut parfois lire des pages complètes de bandes dessinées où les dessinateurs se sont amusés à croiser leurs héros dans des œuvres à quatre mains : ainsi cette page du 4 mars 1905 signée à la fois par  Busnel et  par Béliveau «Une aventure piquante de Timothée et de Citrouillard» où les deux familles habitent dans la même maison à logements, ce qui donne lieu à des jeux de cases superposés très astucieux. Les deux publics, enfantins et adultes, sont ainsi invités à une lecture parallèle des BD.
En 1909, La Patrie ouvre ses porte à la BD américaine très populaire Buster Brown de Outcault. C’est le début de la fin pour la BD québécoise de la première heure. La seconde naissance se produira 60 ans plus tard avec la BDK (3). De 1910 à 1940, la BD américaine, vendue par les syndicats, régis par les empires des propriétaires de journaux, va se répandre partout dans le monde et pas moins de 300 titres de strips vont paraître dans les journaux de la province de Québec durant ces années. Avec Timothée et la vingtaine de héros et d’héroïnes que Bourgeois et ses amis ont inventé à La Patrie puis à La Presse entre 1904 et 1913, on peut dire que les premières bandes dessinées de langue française sont bien nées à Montréal en 1904 (4), 21 ans avant Zig et Puce d’Alain  Saint-Ogan ( Dimanche Illustré,1925).
Mais au fait, pourquoi tant de Baptiste ? C’est sous la signature d’une «Madeleine» dans un album à la mémoire d’Henri Julien que nous trouvons la réponse. Baptiste est « le type par excellence de l’habitant canadien, avec toute sa bonne humeur gasconne, son sourire finaud et roublard, mais combien sympathique. Voyez-le drapé dans son capot d’étoffe du pays, sanglé de sa ceinture fléchée, avec sur sa chevelure hirsute, campée droite et fière, la tuque de grosse laine…» (5). Effectivement, le Baptiste de Bourgeois n’échappe pas à cette règle, et son profil physique évoque les traditionnelles sculptures en bois de Saint-Jean-Port- Joli, tandis que ses réactions s’apparentent de toutes évidences à celles d’un campagnard récemment établi en ville. Le public cible de ces premières bandes dessinées consiste en cette couche populaire qui ne sait pas encore bien lire. Les nouveaux citadins de la métropole, qu’ils soient ruraux ou émigrants, sont ainsi invités à rire des cocasseries de leur propre initiation aux réalités de la ville.

Le premier studio de dessin animé
Bédéiste de la première heure, Raoul Barré (6) fait ses classes lors d’un long séjour de 1891 à 1898 à Paris où il publie des caricatures et illustrations dans plusieurs journaux dont Le Monde Illustré et Le Sifflet. De retour à Montréal, il signe des histoires en images et des bandes dessinées dans Le Canard et La Presse  avant d’aller tenter sa chance à New York tout en continuant à envoyer régulièrement des BD à La Patrie : «Les contes du Père Rhault» (1905-1909), puis «À l’hôtel du Père Noé» en 1913. Au début des années 1910, Barré va vivre une émotion inoubliable. Il assiste à une projection de dessins animés. C’est la révélation. Barré n’aura de cesse qu’il n’ait compris ce nouveau langage. La contribution majeure de Raoul Barré à l’art du cinéma d’animation est d’avoir fondé à New York le premier studio au monde consacré à cette forme d’art, et cela dès 1913. Jusqu’en 1919, il va monter et organiser ce premier studio y employant une foule d’animateurs auxquels il va expliquer les rouages du métier. Il va innover en séparant les tâches et en inventant divers trucs techniques, dont deux lui sont officiellement reconnus et servent encore : le peg bar ou table à rivets, pour empêcher le sautillement des images et le slash system ou papiers sectionnés, pour une animation séparée des personnages et des décors. Mais surtout, grâce à son talent de rassembleur et de communicateur, il sera le mentor des premiers grands animateurs américains : Sullivan, réalisateur de Félix le chat, Messmer, La Cava, Lantz, père de Woody Woodpecker, qui après avoir appris la technique chez lui, vont essaimer dans les autres studios qui vont éclore rapidement. Il a l’idée d’organiser des cours d’art après les heures de travail, où les animateurs peuvent perfectionner leur dessin anatomique avec modèle vivant, offerts gratuitement par Barré, une idée que reprendra Disney dans ses studios des années plus tard. Malheureusement, Barré n’a pas le sens des affaires et non seulement il omet de prendre des brevets sur ses inventions, mais encore il s’associe à des gens plus ou moins fiables. Assombri, il quitte la gestion du studio et après une pause où il s’adonne à la peinture, il revient à l’animation comme co-animateur de Félix le chat. Quand il quitte New York en 1928, il entreprend la même tâche d’enseignement et d’initiation auprès des Montréalais. Il ouvre à Montréal une école coopérative de dessins animé pour transmettre son art et sa vision à ses compatriotes.
En visionnaire, Barré croit que l’avenir du dessin animé passe par le cinéma éducatif. Le même esprit animera les fondateurs de l’Office National du Film du Canada dix ans plus tard. Le souci de Barré de transmettre ses connaissances le mène à concevoir un document filmique d’initiation au dessin animé et au cinéma. Il approfondit ces concepts dans son école et conçoit également des grilles de division du travail. Il entraîne ses élèves dans son vaste projet de long métrage de dessin animé, Microbus 1er, dont le prétexte est une descente dans le monde de l’infiniment petit, à l’intérieur du corps. Les croquis préparatoires font voir une faune burlesque, très dynamique. Malheureusement, ces assauts microbiens ont un aspect autobiographique et Barré décède en 1932 sans avoir pu donner vie à son dernier projet.

L’Office National du Film (ONF)
Fondé en 1939, l’Office National du film du Canada  a au départ une fonction de propagande. Mais très rapidement, sous l’impulsion d’artistes de grand talent dont l’Écossais Norman McLaren (1914-1987), que le directeur  Grierson est allé recruter pour démarrer le premier Studio d’animation de l’ONF, cet organisme va se démarquer par le dynamisme de son Service de l’animation. Déménagé d’Ottawa à Montréal en 1956,  l’ONF a chargé son service d’animation d’une double fonction : soutien technique pour de nombreux films documentaires et création artistique dans des films d’animation aux moyens les plus divers. C’est une chance car les mêmes artistes travaillent souvent à la fois de nombreux projets et s’enrichissent les uns les autres de leurs multiples expériences. Mais l’impulsion est vraiment donnée par ce créateur de génie que fut Norman McLaren qui sut insuffler à ce service autant son inspiration artistique que sa forte attirance pour l’innovation technique.
McLaren a, dès ses débuts en animation, inventé des procédés uniques : il a traité la pellicule comme un tableau de peintre, dessinant les images et le son directement sur le film. Tant de prix de festivals du film lui ont été décernés ! Le film « Les voisins » (1952) remporte un Oscar et « Blinkity Blank » (1955), la Palme d’or au Festival de Cannes, films utilisant respectivement  la « pixillation » ou animation de personnages réels filmés image par image et le grattage sur la pellicule. Dans son film « Les voisins », deux voisins se déplaçant au rythme mécanique de la pixillation s’entretuent sans pitié pour une simple fleur plantée sur leur frontière, symbolisant l’enjeu souvent irrationnel des guerres. La musique produite en son synthétique, obtenu à l’aide de dessins tracés directement sur la bande sonore du film, technique développée par McLaren,  ajoute  à l’allure robotisée des deux guerriers sans cœur et sans pitié. Ajoutons que ce film de plus de 50 ans passe encore très bien la rampe et provoque immanquablement cette alternance de rire et de réflexion typique de l’humour engagé.
  McLaren  a signé 67 films d’animation, la plupart explorant, au gré de son inspiration, les techniques les plus variées. Il a également réalisé des films didactiques expliquant sa démarche, dont les cinq films de la série « Le mouvement image par image » (1976-78).  Ce qui frappe dans la vie d’artiste de Norman McLaren, c’est sa faculté d’être toujours tourné vers l’innovation technique. Dès qu’il maîtrise une technique, il la délaisse pour en inventer une autre, happé par son appétit de la découverte. Il sait s’entourer de collaborateurs doués, car son animation par sa précision et sa virtuosité, demande des centaines ou des milliers d’heures de travail qu’un seul individu ne pourrait effectuer. Ces artistes font la plupart du temps partie de l’équipe régulière du service de l’animation de l’Office, et tout en créant avec McLaren, ils sont aussi invités à s’exprimer dans des œuvres personnelles, à se trouver à travers la plus grande liberté. Toutes les manières d’animer sont encouragées.
Pierre Hébert, avec Souvenirs de guerre (1982), grattage sur pellicule aux contours rugueux et violent plaidoyer contre la guerre et Martine Chartrand, avec Âme noire (2001), animation de peinture sur verre qui retrace toute l’histoire des Noirs du Québec, de l’esclavage à l’intégration, sont aux deux pôles de l’influence marquante de McLaren à l’ONF. Le destin de l’animation est de se trouver souvent bien près des innovations technologiques et son dynamisme conduit l’ONF à innover de plus en plus dans le domaine de l’informatique dans les années 80. Mais sa trop grande transparence en font une cible facile des studios privés, canadiens mais surtout américains qui viennent y puiser à mesure les meilleurs animateurs et techniques. Comme le dit Yves Leduc en 1991, alors directeur du Studio français d’animation : « L’ONF n’a pas à faire la démonstration de sa compétence dans le secteur des images numériques. Dans un univers de recherche où les Disney et les Pixar produisent avec des outils développés localement et sur lesquels ils ne diffusent aucune information, on peut affirmer que le Centre d’animatique (7) de l’ONF avec ses résultats concrets à l’écran et la transparence de ses communications scientifiques, occupe une niche particulière en Amérique. » (8)

Le Pavillon de l’humour
En 1960, la culture québécoise est secouée par la Révolution tranquille. Le Québec change du tout au tout : nationalisations, laïcisation de l’enseignement, baby-boom : 4 millions d’habitants en 1950, 5 millions en 1960, 6 millions en 1970 ! La conscience politique devient plus vive et, surtout, la liberté d’expression devient plus grande.  « Si l’humour constitue un fidèle baromètre de la santé mentale d’un peuple, le Québec en a sa part » , souligne Guy Robert dans L’Art au Québec depuis 1940 (La Presse,1973). La Révolution culturelle met le Québec à l’heure du monde, en particulier avec l’exposition universelle Expo 67 ou Terre des hommes, qui marie l’art, la science et la culture. Or il se trouve que le directeur artistique de l’exposition universelle de Montréal n’est nul autre que Robert Lapalme, caricaturiste bien connu alors au faîte de sa gloire. Il fonde dans le contexte d’Expo 67, le fameux Pavillon de l’humour.
Ce Pavillon unique au monde se maintiendra jusqu’en 1987, portant à partir de 1964 le nom de Salon International de la caricature qui devient en 1971, le Salon International de la caricature et de la bande dessinée. Au départ, le Pavillon de l’humour a de grandes ambitions et il abrite plusieurs genres d’expositions, dont une collection permanente conçue à partir d’un don du Metropolitan Museum de New York. Pour monter ses expositions, Lapalme va puiser dans les collections de divers musées, récoltant là des originaux des grands maîtres de la BD, ici des marionnettes de Java, des statuettes primitives, des masques grecs, des photos insolites, des sculptures mobiles, procédant à un étrange amalgame entre des langages pas nécessairement humoristiques de prime abord. Il est impossible de faire la nomenclature de tous les événements culturels tournant plus ou moins autour de l’humour qui se sont déroulés dans ce Pavillon mais disons que les moyens mis à la disposition de leur conservateur étaient étourdissants. 
Le Pavillon de l’humour s’étiole comme concept après quelques années en raison des  frais exorbitants pour le financer, pour ne devenir qu’un Pavillon où se tiendra tous les étés le Salon qui est en fait une  exposition annuelle et saisonnière à partir d’un concours international de caricaturistes d’abord, puis de bédéistes également après 1971. C’est à ce moment que le Salon se divise trois sections : caricature au sens éditorial, dessin d’humour et bande dessinée. En 1975, il ouvre une section jeunesse, avec trois sous-sections : 6-10 ans, 11-15 ans, et 16-20 ans. Ainsi tous ceux qui s’intéressent de près ou de loin à un langage humoristique, surtout à l’humour visuel, vont se retrouver à un moment ou à un autre dans le maelstrom du Pavillon. Le fameux magazine Croc(1979-1995), avec sa célèbre maxime « C’est pas parce qu’on rit que c’est drôle », naît dans le sillage du Pavillon et il sait drainer tous les meilleurs talents de l’heure en humour visuel, que ce soit en caricature, en dessin d’humour, en bande dessinée ou en tout autre langage métissé comme les photos-romans et les publicités parodiées, à la façon du Hara-kiri parisien dont les créateurs de Croc, et de Titanic (1983-1984), revue uniquement de BD lancée par Croc,  étaient les fidèles émules. Même humour grinçant, même tendance à tirer sur tout ce qui bouge ! Nommer les collaborateurs de Croc et de Titanic, ce serait faire une nomenclature quasi exhaustive de tout ce que le Québec compte de dessinateurs et de caricaturistes à cette époque. Contentons-nous de mentionner l’apport symbolique de notre seul super héros typiquement québécois, le fameux Capitaine Kébec de Pierre Fournier.
 
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Illustration 4 : Pierre Fournier, Capitaine Kébec MC et  ©Pierre Fournier 2008(1975)

Le Pavillon de l’humour a suivi sensiblement la même courbe que celle du Service de l’animation de l’ONF. Au tourbillon produit dans le monde de l’animation mondiale par un Office aussi dynamique de l’Office National du film du Canada, et qui plus est entièrement financé par l’État, en l’occurrence l’État canadien, a succédé une période de crise. Une fois passées les années fastes, les années 80 ont amené le désengagement progressif des trois paliers  gouvernementaux (fédéral, provincial et municipal) dans le financement culturel et les institutions ont été les premières à en pâtir. Les animateurs doués vont plutôt se tourner vers les studios privés  pendant les décennies suivantes, survivant surtout grâce à des alliances financières avec des partenaires étrangers. Les contenus dans ce contexte, seront le plus souvent apportés par les partenaires. Le rôle des studios d’animation québécois dans les années 80 et 90 reste plus technique que créatif et que ce soit chez Cinar ou CinéGroupe, les deux plus grands studios, on ne produit que des séries essentiellement américaines ou européennes.
Quant aux autres formes d’humour visuel, la caricature a trouvé sa niche dans la presse quotidienne comme dans la plupart des pays, et la BD, le dessin d’humour et autres formes hybrides, histoire en images, photo-romans, parodies d’émissions TV et de publicités, se nichent dans les quelques grands magazines d’humour. Croc disparaît en 1995 mais une nouvelle revue d’humour de Québec Safarir avait pris le relais depuis 1987, plus spécialisée dans les parodies de films en vogue et de télé séries québécoises. Lorsque Croc ferme, Safarir prend sous son aile les meilleurs cartoonistes de Croc, élargissant ainsi son public. Déménagé en 2001 à Montréal, Safarir subit lentement une érosion de ses meilleurs dessinateurs vers Délire, née en 1996. Délire vise un public plus jeune, à travers des numéros thématiques tandis que Safarir avait obliqué depuis quelques années vers un discours ouvertement pour adulte. Encore ici, on voit une grande convivialité entre les dessinateurs et les scénaristes qui vont d’un magazine à l’autre sans aucun état d’âme.
 
Les nouvelles technologies
Ce qui se déroulera au début des années 2000 est une véritable révolution. L’informatique imprègne tous les secteurs de l’activité humaine et toutes les formes d’art vont subir des transformations extrêmes dans leur production et aussi leur diffusion.
Le monde des caricaturistes est totalement changé par le raz de marée d’Internet et les petites nations profitent au maximum de la diffusion de masse offerte par le Web. André-Philippe Côté (1955-  ), bédéiste bien connu des amateurs par sa série de 6 albums de  Baptiste le clochard (Soulières éditeur, 1997, 1996, 1995, Éditions Falardeau, 1994, 1993, 1991) et 2 albums de Smog (Casterman, 2004, 2006), le psy délirant, est caricaturiste attitré au quotidien de Québec Le Soleil depuis 1997. À la suite des évènements de 2001, ses caricatures offertes sur le site Web de son journal attirent l’attention et depuis 2003, ses œuvres sont régulièrement reprises par le Courriel International et les divers quotidiens Le Monde, La Dépêche du Midi, Ouest-France, La Dépêche de Toulouse et autres, multipliant ainsi la diffusion de ses clins d’œil savoureux à la politique internationale.
Liberté
Illustration 5 : André-Philippe Côté, « Vous retournez vivre en France ? », Le Soleil, 12 février 2003, repris dans Le Monde, 2 mars 2003, 1er prix du concours du dép. de journalisme de l’Université Berkeley 2003. © Le Soleil 2003

Liban
Illustration 6 : André-Philippe Côté, « Vous êtes ici », Le Soleil, 25 mai 2007, repris par Le Monde, 4 juin 2007. © Le Soleil 2007
Cimat
Illustration 7 : André-Philippe Côté, « Climat », Le Soleil, 3 juin 2007, repris par La Dépêche du Midi, 9 juin 2007. © Le Soleil 2007

Serge Chapleau (1945-   ) débute sa carrière de caricaturiste en 1971, dans Pespectives, dans le style des grandes gueules. Il signera des caricatures éditoriales dans divers journaux dont Montréal Matin, Le Devoir, Le Matin et magazines tels 7jours, Week-End,  Nous. Son ton impertinent et son trait excessif plaisent à la génération des baby-boomers qui ont fait la Révolution tranquille.

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Illustration 8 : Serge Chapleau, Et Dieu créa…Laflaque © Chapleau , 2004

En 1982, Chapleau  produit pendant un an La minute et quart à Gérard D. Laflaque sur les ondes de la télévision publique Radio-Québec. Ces textes satiriques sur l’actualité politique et sociale sont écrits et dits par Chapleau lui-même, sous les traits d’une marionnette aux chairs flasques et aux propos gouailleurs. Le succès de cette mini-série n’empêche pas la station de la retirer des ondes, le ton irrévérencieux n’étant pas à la mode sur les ondes des média électroniques à cette époque. En 1996, Chapleau devient le caricaturiste attitré du grand quotidien de Montréal, La Presse. Lorsqu’en 2004, il reprend sa marionnette de Gérard D. Laflaque, il est très connu et son ton passe tout à fait. Dans la lignée des Guignols de l’info, marionnettes caricaturales dont le spectacle est diffusé en direct et devant public depuis 1990 à la télévision française sur Canal+, Laflaque apporte une nouveauté remarquée, témoin de l’avance technologique du Québec en matière de nouveaux médias : il est produit en animation de synthèse, en d’autres mots, par ordinateur.
Depuis l’automne 2004, Et Dieu créa Laflaque paraît chaque semaine à la télévision nationale, Radio-Canada, à une heure de très grande écoute, dans une parodie de magazine d’information. En une demi-heure de gags hebdomadaires, Gérard, la marionnette en 3D de synthèse et à la voix de Chapleau, est le  présentateur caricatural des événements politiques et sociaux de la semaine. En fait, Et Dieu créa… Laflaque est un défi technologique constant. À part des entrevues en prises de vues réelles dans la rue, genres de vox populi maison hebdomadaires, toute l’émission est produite par ou avec l’aide de l’ordinateur. 100 ans après Bourgeois, Chapleau reste fidèle à cette tradition d’un humour à la fois critique et qui sait présenter  des séquences cocasses de la vie familiale en montrant Gérard aux côtés de son épouse Georgette, qui porte les culottes elle aussi, de son fils Marcel à la compréhension lente, de son père qui perd la tête, Pépère et de son chien Tarzan. En alternance avec des montages désopilants et au rythme effréné en animation de papiers découpés qui commentent la vie parlementaire, les scènes en studio virtuel campent Gérard dans son milieu de travail. Là, Gérard reçoit les politiciens pour les passer au pilori avec l’aide de ses caméramans Roger et Henri, de la séduisante journaliste Sarah-Laurie Joly et d’un revenant de la série de 1982, l’absurde chaussette Ti-Bas. Si ces passages collent à l’actualité et doivent être scénarisés et animés au fur et à mesure, les extraits de la vie quotidienne peuvent être produits à l’avance. Une équipe de 30 personnes, des animateurs aux scripteurs, travaillent à cette production éphémère puisque collée à l’actualité.
Avec son humour décapant et quasi sans censure, ce qui est tout de même surprenant de la part du poste national de télévision d’état, Gérard D. Laflaque renoue avec une tradition d’humour grinçant présente au Québec dans la presse et sur scène mais qui manquait jusqu’ici en animation par ordinateur.

 Dans les années 2000, l’humour visuel, dont  la diffusion a été le plus souvent associée aux médias en papier, que ce soit la caricature, le dessin d’humour ou la BD, se transmute pour se déplacer comme la plupart des autres arts sur le web. Le Québec a une solide expertise dans les nouveaux média, que ce soit l’animation de synthèse, les effets spéciaux pour les films ou les jeux vidéos utilisant les consoles ou le web. L’effet pervers de sa célébrité, c’est que de nombreuses entreprises viennent sous traiter au Québec, uniquement pour l’habilité technique des infographes et la puissance de nos logiciels (9)  et apportent leur propre contenu, très aseptisé et sans aucun message social ou culturel particulier. La technologie Flash, qui permet une animation conviviale et légère en termes d’espace disque, permet d’envoyer facilement des fichiers  sur le web.  Les dangers d’une mondialisation en art sont là,  qui ne touchent pas seulement le Québec, mais qui menacent surtout les petites nations à cause de leur identité. Le second effet de notre hyperactivité dans le monde appelé de façon générale le « multimédia » est que de nombreuses forces de la relève en dessin humoristique qui, en d’autres temps, se seraient tournés vers la caricature ou la bande dessinée obliquent désormais vers cet univers à cause de l’emploi facile et de l’argent qui roule fort. Il faut rester vigilant.

Mira Faradeau, docteure en histoire de l’art, spécialiste de l’humour visuel

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NOTES :
1/ Le défi n’était pas de brosser un historique même partiel de l’humour visuel au Québec, mais bien d’en dégager les grandes tendances. Le choix des œuvres s’est donc effectué de façon à présenter la première de chaque genre : la première caricature, la première histoire en image, la première BD,  le premier héros, la première série, la première équipe  et ainsi de suite.
2/ Falardeau, Mira,  Histoire de la bande dessinée au Québec. Montréal : VLB, 2008
 3/ BDK pour bande dessinée kébécoise, nom que s’est donné le mouvement de BDQ de la contre culture issue de la Révolution Tranquille des années 60, dans un petit clin d’œil à nos racines amérindiennes .
4/ Pour connaître la position de l’auteur, voir : « La naissance de la bande dessinée de langue française » dans Communication (Québec : Nota Bene/Université Laval, 2000 ) et « La BD française est née au Canada en 1904 » dans Communication et Langages (Paris : A. Colin, déc. 2000, no 126, pp. 23-48).
5/ Album Henri Julien. Montréal: Librairie Beauchemin Limitée, 1916, p.13.    
6/ Falardeau, Mira, Histoire du cinéma d’animation au Québec. Montréal : Typo, 2006.
 7/ Animatique : néologisme formé par la contraction d’animation et d’informatique, donc textuellement, animation par ordinateur.
 8/ La bande s’annonce, Bulletin publié par l’ASIFA, Association internationale du film d’animation, 1991.
9/  Et aussi, il ne faut pas se le cacher, pour la générosité des programmes gouvernementaux envers les cités du multimédias, aussi bien à Montréal qu’à Québec, qui sont un puissant incitatif pour des sociétés étrangères, même si aucune exigence envers le contenu québécois n’est formulée en échange. Voir au sujet de l’expansion actuelle : « Boom de l’animation numérique » et « Montréal en 3D », La Presse , (Montréal, 23 sep. 2006).
Tag(s) : #Comptes-rendus ouvrages
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