Lu sur le site du Parisien.fr :
Luz, l'un des dessinateurs de Charlie Hebdo "rescapés" de l'attentat meurtrier qui a frappé sa rédaction mercredi, juge "formidable" le soutien dont bénéficie l'hebdomadaire satirique aujourd'hui mais à "contre-sens de ce que sont les dessins de Charlie".
"Tout le monde nous regarde, on est devenu des symboles, tout comme nos dessins". "On doit porter une responsabilité symbolique qui n?est pas inscrite dans le dessin de Charlie", explique Luz dans un entretien diffusé samedi sur le site internet des "Inrocks".
"C?est formidable que les gens nous soutiennent mais on est dans un contre-sens de ce que sont les dessins de Charlie", ajoute le dessinateur, qui travaille à l'élaboration du numéro qui paraîtra mercredi à un million d'exemplaires, contre 60.000 habituellement.
"Cet unanimisme est utile à Hollande pour ressouder la nation. Il est utile à Marine Le Pen pour demander la peine de mort", note Luz.
"A la différence des anglo-saxons ou de Plantu, Charlie se bat contre le symbolisme. Les colombes de la paix et autres métaphores du monde en guerre, ce n?est pas notre truc", explique-t-il.
"On est un journal, on l?achète, on l?ouvre et on le referme. Si des gens postent nos dessins sur Internet, si des médias mettent en avant certains dessins, c'est leur responsabilité. Pas la nôtre", poursuit le caricaturiste.
"Je n'étais pas à la manifestation spontanée du 7 janvier. Des gens ont chanté la Marseillaise. On parle de la mémoire de Charb, Tignous, Cabu, Honoré, Wolinski : ils auraient conchié ce genre d'attitude".
Selon lui, "Charlie est la somme de personnes très différentes les unes des autres qui font des petits dessins. La nature du dessin changeait en fonction de la patte de son dessinateur, de son style, de son passé politique pour les uns, ou artistique pour les autres".
"Mais cette humilité et cette diversité de regards n?existent plus. Chaque dessin est vu comme s'il était fait par chacun d?entre nous. Au final, la charge symbolique actuelle est tout ce contre quoi Charlie a toujours travaillé: détruire les symboles, faire tomber les tabous, mettre à plat les fantasmes", estime-t-il.