Dans sa chronique "L'éphéméride de l'histoire", le journal Le Monde publie une chronique intitulée "les poires sous presse". Le moins que l'on puisse dire, c'est que l'auteur du billet connaît plutôt mal son sujet...
Lisez plutôt : "Le 1er décembre 1832, la saison des poires était en avance. Un peintre à la carrière jusque-là modeste, Charles Philipon, lançait un hebdomadaire révolutionnaire, Le Charivari. La lithographie était une invention récente, la gravure sur bois de bout triomphait, la monarchie de Juillet promettait la liberté de la presse..."
Qualifier Philipon de peintre est un peu fantaisiste, puisqu'il s'agit d'un dessinateur qui fonde La Caricature en 1830. Le Charivari n'est pas un hebdomadaire, mais un journal quotidien, le premier quotidien satirique illustré à voir le jour. Quant à la Monarchie de Juillet en décembre 1832, ça fait belle lurette qu'elle ne promet plus la liberté de la presse. La censure est alors bel est bien de retour, les journaux saisis, les condamnations prononcées, des journalistes en prison, etc.
On lit plus loin que, face à ce flot de caricatures publiées par Philipon et ses amis,  "Le pouvoir parlerait bientôt de « campagne de l’irrespect ». Cette expression "campagne de l'irrespect" n'est absolument pas contemporaine de la fameuse poire de Philipon, ni même du règne de Louis-Philippe, ni même de la seconde, ou de la IIIe République, ni de la IVe. C'est dans les années 1960 qu'elle apparait pour la première fois, sous la plume d'historiens de la presse...
Quant à la "Puissance subversive du dessin" dont il est question dans ce malheureux billet, il s'agit d'un énième poncif sur la caricature. En 1835, lorsque Louis-Philippe instaure les fameuses lois de censure, la "puissance subversive du dessin" n'a pas réussi à affaiblir le moins du monde le pouvoir et les dessinateurs se soumettent sans résistance... A partir de cette date et jusqu'en 1848, aucune caricature politique ne paraît en France...
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