Vous avez sans doute vu la signature de ce dessinateur qui a été publié dans environ 70 publications dont Le Pêle-Mêle, L’Indiscret, Sans-Gêne, Le Sourire, Pages Folles … (voir Dico Solo ou Dictionnaire des illustrateurs et dessinateurs).
Si vous vous êtes précipités sur le Dico Solo qui recense des centaines de dessinateurs de presse et des journaux satiriques, vous avez lu : "Barn Théophile, signe Th. Barn". Théophile ? Pourquoi pas Théodule, Théophraste, Théodore, Théocrite ou Théo ? Si vous aviez consulté la Revue Littéraire et Sténographique du Centre vers 1900, vous auriez pu découvrir des dessins de "The Barn". (illustration à gauche : portrait de Barn dans le Pêle-Mêle du 04/06/1905)
Deux ans auparavant, c'est à dire en 1898, on trouve en une de la même revue un dessin de Lion qui représente un dessinateur travaillant pour cette revue : il s'agit de M. J. Lagrange. La grange, c'est à dire "the barn" en anglais.
Le dessinateur enlève le « e » et signe dorénavant "Th. Barn".
Julien Lagrange, fils d’un employé des Chemins de fer, est né le 19 octobre 1876 à Orléans. Il y passera la première partie de sa vie. A 17 ans, il suit les cours de l’Ecole Municipale de dessin. En 1894, on le retrouve acteur dans deux pièces de théâtre. Il fait partie également des « Poètes et chansonniers du Mont-Martroy » et participe à la création du cabaret « Le Lézard d’Or ».
Il dessine pour des revues locales, réalise des affichettes ou encore des cartes postales. En 1901, il illustre une édition de luxe des « Contes pour Noël, poèmes et proses ». Barn commence timidement une carrière « nationale », publie un unique dessin dans l’année 1901 du Pêle-Mêle (07/01) et un autre dans la même année de La Caricature (26/01).
Quand il se marie, en août 1902, il mentionne à la rubrique profession : "dessinateur". La presse de la Belle époque le qualifie également de "peintre". Barn s’installe à Paris, probablement en 1904, où il entame une carrière de trente ans comme dessinateur humoriste dans de nombreux journaux. Il participe même au « Salon des Humoristes » de 1913. De 1930 à 1935 Lagrange produit une bande dessinée, genre en plein essor à l'époque, centrée autour de deux personnages : Toto et Lili. Deux albums paraissent, « Toto-Lili et Nanette » (1930) et « Les aventures de Toto et Lili » (1935).
Comme des centaines d'autres, Barn alimente de ses dessins humoristiques une presse alors abondante et gourmande d'images. Comme des centaines d'autres, il concilie son activité de dessinateur dans sa province d'origine et à Paris, centre de la presse satirique en France. Comme chez des centaines d'autres, sa notoriété reste modeste, malgré une vie entière à dessiner.
Jacky Houdré, Olivet, novembre 2020.
Sources :
- article de Christian Chenault dans le Bulletin de la Société archéologique de l’Orléanais n° 179 (2018)
- article de Michel Lelait dans le Carto (Bulletin de liaison des cartophiles du Loiret) n° 144 (mars 2019)