Lu sur le site de la RTBF : (article bien intéressant, même s'il faut, selon nous, relativiser le "pouvoir" du dessin de presse)
Cette année, le jury du Press Cartoon Belgium n’a pas pu trancher. Gal et Lectrr remportent ex aequo le premier prix 2025. Deux visions, deux générations, mais un même constat : le dessin de presse reste un média à part entière, essentiel, et parfois dérangeant.
Parmi les 416 dessins sélectionnés, deux œuvres se sont imposées pour leur force et leur résonance avec l’actualité. Le jury, exclusivement composé de journalistes cette année, n’a pas pu départager les deux dessins finalistes. "Ce qui a fait la différence, c’est leur capacité à dire beaucoup avec très peu", explique Annick Capelle, responsable éditoriale Europe à la RTBF et membre du jury.
Le pouvoir d’une image
Dans un climat marqué par les conflits internationaux et les tensions croissantes autour de la liberté d’expression, dix ans après l’attentat contre Charlie Hebdo, le choix du jury résonne fortement. Le dessin de presse, plus que jamais, s’affirme comme un média à part entière.
C’est ce que souligne Pauline Zecchinon, docteure en Information et Communication à l’UCLouvain. "Il faut arrêter de considérer le dessin de presse comme une simple illustration qui accompagne le texte. C’est un genre journalistique autonome, avec une vraie plus-value : il apporte une information supplémentaire, qui complète le texte." Quant au dessin de presse qui a une visée politique, comme la caricature, on peut ajouter la dimension d’opinion, affirme la chercheuse. "Là où la photographie, malgré le regard subjectif du photographe, reste parfois contrainte par le réel, le dessin permet d’aller plus loin, d’assumer un regard engagé et engageant, tant pour celui qui fait le dessin que pour le média qui le publie."
Pour la chercheuse, l’immédiateté fait la force, mais aussi parfois la violence, du dessin. "D’un coup d’œil, on voit, on comprend. Le lecteur n’a pas le choix. Il est obligé d’appréhender ce qu’il a vu, alors qu’un texte nécessite un effort, un engagement volontaire. Le dessin s’impose. Et c’est pour ça qu’il peut déranger."
Deux dessins, deux approches
Le dessin de Gal, 85 ans, est sans doute le plus controversé. Il établit un parallèle saisissant entre ce que les nazis ont fait aux Juifs et ce que, selon lui, Israël fait aujourd’hui aux Palestiniens. Un raccourci visuel qui percute. "Cela ressemble presque à une carte dessinée par un enfant, mais le regard qu’il porte est désarmant de justesse", analyse Annick Capelle. "Il résonne avec le débat actuel : y a-t-il génocide ou pas ? Et surtout, il ne se place pas dans l’attente d’une validation juridique internationale."
Gal, doyen du dessin de presse belge, assume ce choix. "Je suis né en 1940, sous les bombes. J’ai grandi avec les V1 au-dessus de la tête. Cette enfance m’a donné l’envie de documenter le monde par le dessin. Peut-être que c’est prétentieux de croire que ça change quelque chose… mais je le fais."
Il avoue avoir longtemps hésité avant de proposer ce dessin à son éditeur. "C’est la sortie de Georges-Louis Bouchez, disant qu’il n’y a pas de génocide parce que les Gazaouis sont plus nombreux aujourd’hui, qui m’a décidé."
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