Bado, « Sans dessins du prophètes », Ed. David (Ottawa), préface de Plantu, 122 p.
Dessiner l’actualité aujourd’hui constitue un sport étrange. Le caricaturiste, accoudé à sa table à dessin, assis derrière son bureau et parfois face à sa tablette graphique, égratigne les grands de ce monde, souligne leurs contractions, trouve un biais pour faire rire aux dépends de ces cibles, commente les guerres et les crises qui touchent des foules immenses et souvent lointaines. Certains auteurs d’ouvrages sur la caricature dépeignent le dessinateur éditorial comme un chevalier blanc, redresseur de torts et grand défenseur de la liberté d’expression. Un homme (ou une femme !) habile et vertueux, sans oublier le courage pour affronter les « puissants ».
La vérité, comme toujours, semble moins caricaturale que le stéréotype.
Invité d’honneur aux Ridep 2013 (Carquefou, France), Bado n’a pas manqué d’évoquer les différentes facettes du métier, rappelant que contrairement à ce que l’on entend ici où là, l’impact du dessin de presse sur le lecteur demeure limité. Membre de Cartooning for peace, Bado indique aussi combien le dessinateur de presse travaille en cohésion avec la rédaction en chef qui "encadre" le crayon du cartoonist.
Travail d’équilibriste.
Au-delà des définitions, chaque dessinateur tente de trouver sa place (tout dépend du type de support pour lequel il travail, et du pays bien sûr !), un ton adéquat. Chez Bado, commentaire rime avec poésie. Au confluent de deux traditions (le cartoon anglo saxon et la caricature à la française), Bado travaille pour le quotidien Le Droit d'Ottawa (150 000 ex) depuis une trentaine d’années (8 000 dessins). Loin du ton débridé de Charlie Hebdo (qu’il apprécie néanmoins), Bado évoque les aléas du monde dans un jeu de combinaisons visuelles desquelles sont exclus tous les effets de théâtralité chers à la caricature.
Dessinateur sage ?
Sans aucun doute. Mais un sage qui sait piquer, un sage qui jongle avec les formes, comme d’autres le font avec les mots. De son Québec lointain, Bado (dont on retrouve régulièrement les dessins dans Courrier International) questionne le lecteur plus qu’il ne lui assène sa vérité, comme on s’en rend compte dans ce beau recueil édité par les Editions David d’Ottawa. Un recueil en couleur comprenant plus d’une centaine de dessins et préfacé par Plantu. Avec quelques thèmes à l’honneur : le monde, les USA, le Canada, le Québec, sans oublier quelques dessins d’humour...
GD, février 2013