Vous dessinez pour le Figaro.fr depuis 2010, comment en êtes-vous venu au dessin d’actualité ?
O. M. : Je dessine depuis toujours de part mon métier et formations ( architecte d'intérieur et école de graphisme + école Boulle) j'ai commencé par envoyer quelques dessins d'actualité au cours
de l'année 2010 à quelques amis. Dessins que je faisais de temps en temps par plaisir. Et puis en septembre 2010 j'ai envoyé une petite compilation de ces dessins au Figaro.fr et d'autres
journaux sans connaitre personne.
Depuis la mort de Faizant, le Figaro ne publie plus de dessins politiques. Avez-vous le sentiment de prendre la relève ?
Historiquement et culturellement un quotidien ou hebdomadaire est bien souvent accompagné d'un dessin qui permet d'insérer une récréation festive dans un flot d'informations pas toujours
réjouissante. C'est aussi un rendez-vous avec les lecteurs comme l'ont été les dessins de Jacques Faizant pendant des dizaines d'année au Figaro. je n'ai pas du tout le sentiment de
prendre la relève de Faizant car je ne suis pas encore rémunéré pour mes dessins ! et ma courte carrière est difficilement comparable à celle de Faizant !! et je ne parle pas de son talent... Et
puis je dessine dans le Figaro.fr et non sur le Figaro papier, ce qui présente une nuance significative. On peut regretter que le Figaro papier ait abandonné pour le moment un
dessinateur national pour choisir les dessins du New Yorker... Mais on peut espérer que les choses changent !
Il existe une tradition du dessin de presse de droite, avec des dessinateurs illustres comme Forain et Sennep qui ont tous deux travaillé pour le Figaro. S’agit-il pour vous de
modèles ?
Je n'ai aucun modèle et ne souhaite pas en avoir et surtout pas avec une couleur politique. Je considère que les leaders du dessins de presse en France sont Pétillon et Lefred Thouron. Je dessine
aujourd'hui pour le Figaro.fr car je n'ai pas eu de réponse d'autres rédactions. Le figaro.fr m'a bien accueilli au départ même si l'arrivée d'un dessin est vraiment nouveau pour eux au sein de
leur site. Mais je travaille à les faire évoluer !!
Vous définissez-vous comme un dessinateur de droite, espèce rare actuellement, où le dessin d’actu est plutôt dominé par la gauche ?
Je ne me considère absolument pas comme un dessinateur de droite ni de gauche d'ailleurs. Le fait que je collabore aujourd'hui avec le "Figaro.fr" me confère peut-être automatiquement une
étiquette. Les gens se sentent rassurés de savoir à qui vous "appartenez", juste pour savoir si ils vont vous aimer ou pas !! la seule réponse valable à cette question est de regarder mes
dessins.
Ni de droite, ni de gauche… Pétillon et Lefred Thouron sont des dessinateurs de gauche ! Hormis le Canard Enchainé, le premier donne même ses caricatures à des magazines de la
CGT. Le dessinateur de presse n’a-t-il pas vocation à affirmer un point de vue particulier, à offrir un regard tranché sur les choses ?
Comme quoi on peut-être de gauche et avoir aussi de l'humour !! je plaisante. Le dessinateur de presse peut donner son regard tranché sur les choses mais il peut aussi pointer l'aspect ridicule
ou comique de la situation sans méchanceté et sans revendication latente. Certains choisiront des sujets difficiles pour y passer un message politique. Ce n'est pas ma démarche. J'essaye
d'apporter une touche de légèreté, non anodine bien sûr, sur un sujet ou bien une personne qui se prendraient un peu trop au sérieux.
Mais quand on dessine au Figaro.fr ou à l’Humanité.fr ou pour d'autres sites de journaux qui ont une couleur politique, on assume la ligne éditoriale et donc politique du journal, non
?
IL faut sans doute nuancer : la ligne éditoriale des grands sites d'information sur internet, c'est la ligne éditoriale de l'AFP ! Et puis pour répondre à votre question gauche droite que
je ne peux visiblement pas éviter, je prendrais justement l'exemple d'un journaliste que j'aime bien certainement pour son parcours qui doit en déstabiliser plus d'un. Il s'agit de Patrick
Besson. Il a démarré à l'Humanité, puis à VSD, ensuite au Figaro, Voici, Marianne et en ce moment au Point. Vous voyez aujourd'hui je dessine pour le figaro.fr
mais demain je dessinerais peut-être à l'Huma. Et vous devrez changer votre bio sur moi !! Et n'oubliez pas que le Figaro ne me paye pas pour mes dessins. Difficile de se ranger
derrière une entreprise avec qui vous n'avez pas de contrat, ni engagement ! Je tiens vraiment à cette neutralité. Je ne sais pas comment me classer car il faut toujours être classé quelque
part pour exister. Je lis l'actu, une m'inspire, je fais un dessin et c'est tout. Figaro ou pas Figaro.
Une présence quotidienne dans la version papier du Figaro serait-elle envisageable ?
Mes dessins ne sont pas repris dans la version papier. Une présence quotidienne me parait difficilement envisageable car c'est un exercice très difficile et périlleux de prétendre faire sourire
les gens au quotidien. De plus je serais contraint d'abandonner mon métier actuel d'architecte d'intérieur. Mais la question n'est pas là. Il faudrait déjà que le Figaro papier
s'intéresse à mes dessins... C'est un grand groupe, je ne connais pas encore tout le monde...
Jouissez-vous d’une totale liberté pour la mise en ligne de vos dessins sur la page dont vous disposez sur le Figaro.fr ?
A 95% tous mes dessins passent. Le Figaro.fr à une charte bien spécifique ( que je n'ai pas lue !) Mes dessins de "gauche" comme de "droite" passent sans problème. Je pense qu'il y a une
grande liberté de ton. J'évite d'aborder des sujets graves avec des victimes. Je ne veux pas être méchant ou blessant. Ce n'est pas mon caractère et ça ne m'intéresse pas.
Vos dessins suscitent parfois des commentaires hostiles. Ca vous agace ?
C'est une très bonne question : il n'y a pas ou très peu de commentaires sur un dessin qui passe sur la Une du Figaro.fr qui pourtant est vue par 10 millions de visiteurs. Par contre sur la
page facebook du Figaro, les commentaires fusent mais pratiquement jamais sur le dessin en lui-même !! Les gens peuvent s'invectiver de manière parfois virulente à travers le sujet du dessin.
C'est assez frustrant pour le dessinateur. Lorsque je trouve parfois un commentaire négatif sur le dessin, je me fais fort de le copier et de le mettre à la fin de mes livres ! Je me
souviens d'un commentaire dans lequel une personne me traitait de "lamentable et à la solde des socialistes" car j'avais osé dessiner Sarkozy et Carla quittant l'Elysée en remerciant Hollande
jetant par une des fenêtres du palais un jeu de Scrabble en disant "tenez vous avez oublié votre scrabble !"... je reprenais bien sûr une scène des Bronzés font du ski. Comme quoi il en faut peut
pour déchaîner les passions !!
Comment définiriez-vous un bon dessin de presse ?
C'est un dessin qui ne prend pas beaucoup de temps à être décrypté, avec très peu de texte. C'est très difficile. Je n'en suis pas encore à ce stade !!
Page d'Olivier Ménégol sur le site du Figaro.fr
Propos recueillis par Guillaume Doizy, janvier 2013