"Sketch Freedom Cartoon Expo", entretien avec Kianoush Ramezani, commissaire de l'exposition

Tu as conçu l’exposition « Sketch Freedom Cartoon Expo » qui se tiendra bientôt à Göteborg en Suède. Quel est l’objet de cette manifestation ?

J'ai fondé un mouvement appelé “Sketch Freedom” (Dessine la Liberté) que j'ai lancé en 2013 de Normandie. C'est un mouvement mondial pour aider les dessinateurs en exil. J'ai ensuite initié un projet pour faire de l'exposition Sketch Freedom l'évènement officiel du festival du film de Göteborg. La première fois, j'ai été le commissaire de l'exposition en partenariat avec Les Archives Nationales Suédoises de Göteborg qui ont hébergé l'expo l'année dernière et qui l'hébergent de nouveau cette année. L'exposition de l'année dernière a été une première mondiale pour le mouvement. Le festival compte plus de 300 000 spectateurs, c'est pourquoi je voulais faire entendre ma voix et rendre visible ces deux concepts : les dessinateurs exilés et la liberté d'expression. C'est un projet original qui n'a aucun équivalent dans le monde du dessin de presse.

(I'm the founder of a movement called "SKETCH FREEDOM" which I started in 2013 from Normandy. It's a world movement to support cartoonists in exile. then I initiated the project of Sketch Freedom Expo as the official event of Goteborg film festival. For the first time I curated the expo and opened it together with national archive of Sweden in Goteborg which became the host of the expo last year and is the host this year as well. Last year's expo was the world's premier of my movement. The festival has more than 300000 audiences and I wanted to have a laud voice and give visibility to the concept: the exiled cartoonists and also freedom of expression! It's a unique project and has no similar example in the world of cartooning.)

Sur quels critères les dessinateurs/trices ont-t-ils (elles) été choisis ?

Leur talent, leur engagement dans le mouvement, ce qui les caractérise et ce que je pense d'eux.

(Their skill, their engagement to this movement, their carrier quality and my feelings about them!)

Le dessin éditorial s’appuie sur une palette de signes communs à la plupart des dessinateurs. Quelles figures ou procédés récurrents sont-ils utilisés pour évoquer la liberté d’expression et les contraintes qu’elle rencontre ?

Lorsqu'ils travaillent sur ce thème, les dessinateurs utilisent d'une façon ou d'une autre les mêmes symboles, évoquent les mêmes problèmes pour créer leurs œuvres. Les journalistes, les media, la presse, la répression et la prison sont les sujets les plus populaires.

(Cartoonists use somehow similar symbols and issues to make their artworks on this theme. Journalists and media, press, repression and prison are the most popular topics in this theme.)

Quelles sont les différentes menaces qui pèsent aujourd’hui sur liberté d’expression ?

Je peux mentionner deux sortes de menaces : celle qui dépend du pays et celle qui dépend de sa situation politique. Dans les pays en crise, le système tue systématiquement la liberté par la censure et autres modes de répression. Dans les pays “démocratiques” l'auto-censure ainsi que la censure par l'argent et le profit sont les deux principales menaces.

(I can mention two kinds of threats: depends of the country and its situation. In the crisis countries, the system is killing freedom systematically by censorship and other ways of repression. In "democratic" countries the threats are self censorship and money and benefit censorship!)

Les dessinateurs sont-ils plus facilement victimes de la censure que les journalistes de plume ?

Je peux répondre oui, en général, pour les deux dans les pays dictatoriaux . Mais dans les pays religieux qui ont également des tabous sociaux, le danger, pour les dessinateurs est bien plus important.

(I can say yes in the dictatorship counties in general for both. But in the religious countries which have social taboos as well, the danger is more for cartoonists.)

Au fait, c’est quoi, un bon dessinateur de presse ?

C'est celui qui s'engage pour la liberté d'expression et pour la vérité. Celui qui est sensible aux problèmes de la société et qui agit est finalement celui qui dessine le mieux. La technique est très importante : elle est l'instrument qui sensibilise les gens et qui fait passer le message.

(The one who is engaged for freedom of expression and for the truth! The one who is sensitive and activist in thé society and finally the one who draws very well! Technic is very important because it's a tool to impress people and to transfer the message.)

Pourquoi cette exposition se tient-elle en Suède ? A-t-elle vocation à circuler ?

Simplement parce que la réponse des parisiens ne fut ni positive ni concrète. Mon premier et dernier projet international fut l' “Exposition Internationale des Exilés” en 2011. J'ai obtenu une bourse d'artiste résident à la cité des arts de la Ville de Paris comme récompense pour avoir mis sur pied l'Expo des Exilés, avoir été son concepteur et commissaire mais quelques mois plus tard, mon projet avait été volé par la Maison des Journalistes, avait circulé dans beaucoup de pays et d'endroits sans que je sois informé, sans ma participation !!!

A Paris, j'ai un statut qui empêche les décideurs de me prendre au sérieux. Je suis un réfugié. Il y a une grande exception : Le Mémorial de Caen. Le directeur du mémorial est le seul, je dis bien le seul, à ne pas prendre ombrage de mon statut ! Quelle différence ! Les conséquences sont bien sûr évidentes. Grâce à ce point de vue, j'ai été, en Normandie, impliqué dans beaucoup de projets concernant le dessin de presse professionnel . L'année dernière, j'ai pu lancer le mouvement “Sketch Freedom” et faire, maintenant pour la deuxième fois, l'expo en Suède. Du point de vue suédois, je suis simplement Kianoush,un artiste et un commissaire efficace ! De plus, ils ne voient pas mon étiquette “pauvre réfugié”. Si un tel projet existe pour la seconde fois en Suède, c'est la seule raison.

Je rêve de faire venir cette expo à Paris et dans d'autres villes françaises. Mais ils leur faut voir ce que je fais, il faut qu'ils m'invitent ! .Cette fois, je ne vais rien leur demander, pas question de réclamer.

(Simply because I didn't find any positive or practical feedback from Parisians ! My first and last international project was "Exile International Expo" in 2011. I got the scholarship of art residency at la cité des arts from Ville de Paris as an award for making Exile expo and being its initiator and curator and some months after that my project had been stolen by la maison des journalists and travelled in many countries and places without my information and involvement!! In Paris I have a label which prevents the deciders to take me serious: I'm a refugee!! But here is a big exception: Le Mémorial de Caen. The director of mémorial became the “only” one who saw me without that label! the results is so visible and different. Thanks to this vision I have been involved in many professional cartooning project in Normandy, I could start the “Sketch Freedom” movement since last year and now making the second year of its expo in Sweden. According to Swedish vision, I'm just Kianoush, an artist and a powerful curator! and they don’t see my “miserable refugee” label. That’s the only reason that run such a project for the second time in Sweden. I'm dreaming to travel this expo to Paris and other cities of France. But they need to see what I'm doing and they need to invite me! This time I'm not going to ask or demand them anything.)

Propos de Kianoush Ramezani recueillis par Guillaume Doizy et traduits de l’anglais au français par Daniel Dugne

Tag(s) : #Interviews
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