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Le sourire de Jaurès caricature de Jaurès

Par Bruno de Perthuis

En septembre 1902, un incident renforce l’image d’un Jaurès à la solde de Berlin, image apparue dans la caricature lors de son engagement dans l’affaire Dreyfus. En effet, pour s’excuser de ne pouvoir assister au congrès d’Imola, il envoie aux socialistes italiens une lettre dont une version est publiée dans la presse italienne, puis en France dans Le Journal de débats : « Les socialistes italiens contribuent au dehors à une grande œuvre. Ils ne détruisent pas la Triple Alliance, moyen d’équilibre contre notre chauvinisme, et contre les fantaisies franco-russes ; mais ils lui enlèvent peu à peu tout caractère agressif et hostile, et ils rendent ainsi possibles les vastes groupements de peuples qui permettront le désarmement général. Je ne puis croire que vous renonciez à une action dont la fécondité se révèle tous les jours. En France, quoi qu’on vous en dise, l’esprit de secte et d’orgueilleuse impuissance est frappé à mort ». Dans Jaurès et ses détracteurs, Alexandre Croix écrit qu’on reste étonné que ces paroles ne brisèrent pas la carrière politique du tribun pour toujours, parce qu’oser « parler de chauvinisme en France et, de surcroît, de fantaisies franco-russes, c’était vraiment témoigner du goût du suicide, tant auprès des cercles éclairés que des masses, assoties par tant d’années d’hystérie patriotique, à laquelle les socialistes avaient eu leur juste part ». Le journal La Libre Parole de Drumont du 16 septembre 1902, titre « Le triplicien Jaurès ». Dans la caricature, l’image d’un Jaurès à la solde de Berlin refait donc surface. Orens publie une lithographie datée de septembre 1902, tirée à 150 exemplaires et intitulée Le sourire de Jaurès, député français ? 

Ici, l’artiste se demande si Jaurès qui préfère la Triplice regroupant l’Italie et l’Autriche-Hongrie autour de la puissante Allemagne, à l’alliance franco-russe, est bien un député français. Il le représente alors rêvant du casque à pointe en guise de mascotte. Pendant près de deux semaines, à partir du 18 septembre, Jaurès défend sa position. Dans La Petite République, il continue d’accuser la société française de chauvinisme, et persiste à présenter la Triple Alliance comme un bouclier contre les dangereuses aspirations de ses
compatriotes. Mais il compte également des ennemis dans son propre camp, certains socialistes estimant, en effet, qu’il est chimérique de croire à la paix tant que le capitalisme n’est pas aboli.
 
 

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